Eradication de la polio : vaccination ou assainissement de l'eau ?
A la récente émission [0] sur les vaccinations sur France 5 dans "C à vous" le 18 janvier 2018, l'invité du jour était Didier Raoult, microbiologiste de renommée mondiale et qui arrive avec son livre "Tout savoir sur les vaccins".
Sur la polio les journalistes ne vont pas être très performants mais même Didier Raoult va se mélanger les pinceaux entre le virus de type 2 et celui de type 1 ainsi que sur le fait que seul le virus vivant de type 2 a été supprimé du vaccin oral trivalent remplacé par le bivalent toujours utilisé. Ce n'est pas encore la fin du vaccin oral comme il a pu le dire.
Si en 2017 il y eu seulement 22 cas de polio par des virus sauvages, il y en a eu 91 par des virus polio dérivés de souches vaccinales (WPV pour polio virus sauvage sauvage et cPVDV pour polio virus circulant dérivé du vaccin) : http://polioeradication.org/polio-today/polio-now/
Bref, cela m'a décidé à publier cet article pour essayer d'éclairer un peu l'affaire.
[0] https://www.france.tv/france-5/c-a-vous/saison-9/393961-tout-savoir-sur-les-vaccins-c-a-vous-18-01-2018.html
En 1988, l'OMS présenta à l'Assemblée mondiale de la santé (AMS) son plan pour l'éradication mondiale de la poliomyélite. Il tenait en 6 étapes :
1- Arrêt de la circulation des 3 virus polio sauvages en 2000 par l'utilisation du vaccin polio oral à virus vivants (VPO).
2- Arrêt de la vaccination par le VPO.
3- Dans les 3 à 6 mois qui suivront cette interruption, les virus dérivés de souches vaccinales et mis en circulation par le VPO cesseront de circuler.
4- Trois ans plus tard, en 2003, proclamation officielle de l'éradication des virus de la poliomyélite.
5- Suppression de la vaccination contre la polio.
6- Cette suppression entrainera de très importantes économies qui pourront être réinvesties dans d'autres programmes de santé.
A l'heure actuelle, en 2017, seuls les points 1 et 2 ont été réalisés pour le seul virus sauvage de type 2. L'éradication mondiale du virus sauvage de type 2 a été officiellement proclamée le 20 septembre 2015 et l'arrêt du vaccin oral de type 2 dans les 145 pays qui utilisaient le VPO triple a été réalisé en avril-mai 2016 [1]. Il a été remplacé partout par le vaccin vivant bivalent avec les virus de type 1 et 3.
Mais le plus gros problème ne sera pas l'éradication des virus sauvages de type 1 et 3. Ce sera l'éradication des virus dérivés de souches vaccinales qui se substituent aux virus sauvages pour circuler comme eux et avec la capacité de retrouver la même virulence que les sauvages en se combinant avec d'autres virus dans les intestins des humains et ce tant que le traitement de l'eau consommée par les populations ne sera pas suffisant pour en arrêter la circulation.
En effet, le point 3 du programme OMS s'est avéré complètement faux et cela compromet très sérieusement, quoiqu'on en dise, l'éradication de la poliomyélite dans un avenir prévisible. Voici comment l'OMS présente, dans son bulletin (7 juillet 2012) [2] ce qui fut pour elle, une surprise ( ce serait plutôt cela la surprise car c'était prévisible …).
« En 2000, la campagne d’éradication de la poliomyélite semblait approcher de sa fin. L’année précédente, le monde avait réussi à se débarrasser du poliovirus sauvage de type 2, tandis que les poliovirus de type 1 et 3 étaient limités à quelques centaines de cas. Mais, à la surprise des experts, le virus s’est alors comporté d’une manière inattendue.
Quelque part sur l’île d’Hispaniola dans les Caraïbes, un enfant a été frappé de paralysie, celle-ci étant causée par le poliovirus vivant qui est utilisé pour fabriquer le vaccin. Ces cas de paralysie poliomyélitique associée au vaccin étaient connus depuis des années, mais étaient – et restent encore – extrêmement rares. Le plus inquiétant dans ce cas tenait au fait que le virus dérivé du vaccin s’était propagé de la même façon qu’un virus sauvage, et était à l’origine d’une flambée.
Vingt et un enfants en République dominicaine et en Haïti – les deux pays constituant l’île d’Hispaniola – ont été paralysés et deux d’entre eux sont décédés avant que la flambée ne puisse être enrayée par des campagnes de vaccination de masse. L’épisode a révélé une nouvelle possibilité alarmante* : le vaccin de choix dans la plupart des pays, le vaccin antipoliomyélitique oral trivalent, pouvait lui même conduire à de nouvelles flambées de poliomyélite.
Bien que de telles flambées aient eu lieu dans 16 autres pays depuis la flambée enregistrée sur l'île d’Hispaniola, elles sont extrêmement rares, compte tenu des 10 milliards et plus de doses de vaccin antipoliomyélitique oral qui sont administrées à 2,5 milliards d’enfants.
Pour les responsables de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le puzzle de l’éradication est soudainement devenu beaucoup plus complexe.
«Nous avons pris conscience que nous devions non seulement éradiquer le poliovirus sauvage, mais aussi le virus dérivé du vaccin», déclare Bruce Aylward, Sous-Directeur général du Groupe Poliomyélite.
«Nous étions donc confrontés à cet énorme nouveau problème et nous devions trouver une solution radicalement nouvelle. Cela a été un sacré défi», déclare le Dr Aylward.
* Pour Hispaniola on a pu établir que le virus venait de recombinaisons entre une souche vaccinale de type 1 et au moins 4 entérovirus différents, ce qui a crée un virus ayant retrouvé la capacité de provoquer des paralysies et celle d'une transmission interhumaine. Ces recombinaisons se font dans les intestins des êtres humains que le virus rencontre en circulant. S'il peut exister des contaminations directes d'homme à homme pas des souillures fécales, l'essentiel se fait par le relai des eaux consommées et contaminées par des matières fécales.
L'éradication officielle du poliovirus sauvage de type 2 qui n'a plus été vu depuis octobre 1999 n'a pas empêché des virus polio de type 2 de souche vaccinale de provoquer des paralysies après cette proclamation :
Voici des extraits du REH du 12 février 2016 [3] qui faisait le point sur des flambées de poliovirus circulants dérivés de souches vaccinales (PVDVc) dans 5 pays en 2014-2015, dont 2 par le virus de type 2.
« En Guinée, un enfant de la province de Kankan a manifesté des symptômes le 20 juillet 2015. Il s’est rendu à Bamako (Mali) où un PVDVc2 présentant 25 différences nucléotidiques avec la souche vaccinale Sabin de type 2 a été isolé à partir d’un échantillon de selles reçu le 4 septembre 2015. Génétiquement, il était lié à un cas de PVDVc2 survenu en Guinée, avec apparition de la paralysie en août 2014... 3 autres PVDVc2 ont ensuite été identifiés, la paralysie remontant pour le dernier cas au 2 octobre 2015.
Au Myanmar, un PVDVc2 présentant 15 différences nucléotidiques avec la souche vaccinale Sabin de type 2 a été isolé à partir d’un échantillon provenant d’un enfant chez qui les symptômes sont apparus le 5 octobre 2015 dans la province de Rakhine. Ce cas est lié génétiquement au cas de PVDVc2 survenu dans la même province, avec apparition des symptômes le 16 avril 2015.
des PVDVc ont aussi été signalés au Nigeria et au Pakistan au cours du premier semestre de 2015. »
Pour comprendre
Les virus polio sont des entéro-virus qui suivent les mêmes voies que celles de la nourriture, y compris ceux présents dans le vaccin oral. Une fois dans l'intestin, après avoir pris la voie buccale par l'eau consommée et contaminée par un virus par exemple, le virus, (ou plutôt des millions), va pouvoir traverser la paroi intestinale par les villosités intestinales comme le fait la nourriture. Il pourra alors infecter l'organisme. Si celui-ci est immunisé, par exemple par le vaccin injectable ou encore par une contamination préalable plus modérée, ce dernier pourra éviter la maladie.
Ce sera généralement le cas avec les virus vivants du vaccin oral qui pourront créer ainsi une immunité humorale comparable à celle du vaccin injectable. Cependant, il arrive parfois que ces virus vaccinaux déclenchent une paralysie poliomyélitique chez le vacciné.
Mais, comme pour la nourriture, tous les virus présents ne vont pas prendre cette voie. Les autres vont poursuivre leur route dans l'intestin. Par ce premier passage dans l'intestin, les virus polio du vaccin oral pourront créer une immunité intestinale qui bloquera les virus polio qui pourraient arriver par la suite, mais seulement après un premier passage (au minimum).
Autrement dit, quand un enfant reçoit pour la première fois un virus polio sous la forme du vaccin VPO, des virus vaccinaux se retrouveront dans les selles car l'immunité intestinale qui pourrait les bloquer n'existait pas. Ce point est très important à comprendre. C'est pourquoi l'OMS a toujours dit qu'il faudra supprimer le vaccin VPO pour éradiquer la polio.
La stratégie actuelle (depuis mai 2016) consiste à utiliser le VPO bivalent (donc sans le type 2) et à vacciner les enfants par au moins une dose de vaccin injectable triple, donc contenant le type 2. Ainsi, les enfants qui naissent depuis mai 2016 ne sont plus immunisés contre le type 2 par le vaccin oral mais par le vaccin injectable.
Cette stratégie peut permettre d'éviter que des enfants soient paralysés par un type 2 dérivé de souche vaccinale mais elle ne pourra empêcher ces virus de continuer à circuler. Si l'arrêt du vaccin trivalent permet de ne plus en introduire de nouveaux, ils sont toujours présents dans les intestins de millions d'êtres humains. En Inde il y a 26 millions de naissances par an. Quand certains de ces enfants recevront un virus dérivé de souche vaccinale de type 2 ils le relargueront par leurs selles et le virus pourra poursuivre sa route dans l'environnement puis retrouver d'autres individus.
Penser que cette stratégie va arrêter la circulation de ces virus
est une illusion de plus de la part de l'OMS.
En réalité, comme le montrent certains indices, l'OMS en a conscience mais elle a le dos au mur, alors, pour ne pas perdre la face, tout en tentant d'éradiquer les virus sauvages de type 1 et 3 - et elle peut y parvenir - elle demande aux Etats de barricader avec le vaccin injectable afin de limiter le risque de paralysies provoquées par les virus dérivés de souches vaccinales.
Il est possible que dans quelques années, l'OMS puisse proclamer l'éradication des 3 virus polio sauvages comme elle l'a fait pour celui de type 2 il y a 2 ans. Partout les médias annonceront que la polio a été éradiquée. Ce sera faux mais l'OMS ne publiera pas de démenti.
L'éradication réelle de la polio devrait s'accompagner de la fin de la vaccination.
Il n'en sera rien, bien au contraire. L'OMS insistera beaucoup pour que la vaccination injectable soit systématiquement pratiquée partout dans le monde afin d'éviter des paralysies alors que ces virus continuerons de circuler.
L'éradication signifie l'arrêt de la circulation des virus.
Elle ne se fera pas dans un avenir prévisible. Cependant, ce résultat a été obtenu en France et en Europe. Il n'a pu être obtenu par les vaccins car ceux-ci ne peuvent pas arrêter la circulation des virus, ce doit être très clair :
1- Le vaccin injectable n'a pas d'action sur l'intestin, là où les virus polio transitent.
2- Si le vaccin oral peut bloquer les virus qui suivront après qu'il ait installé une immunité intestinale, cette immunité n'existe pas à son premier passage. Les virus du vaccin peuvent donc poursuivre leur route.
En conclusion de ces explications, si les vaccins ont une certaine efficacité pour éviter une paralysie ou pour substituer les virus dérivés de souches vaccinales aux virus sauvages, ils ne peuvent interrompre la circulation de ces virus. |
Les poliovirus sauvages ou d'origine vaccinale ne circulent plus en France*. C'est la définition de l'éradication qui a été certifiée pour la zone Europe de l'OMS. On peut affirmer que ce résultat n'a pu être obtenu par les vaccins. Ce sont l'ensemble des mesures d'assainissement et de contrôle de l'eau qui ont permis ce succès. |
* Ce point m'avait été confirmé par Bruno Lina le 16 mars 2015, aux secondes Assises du vaccin qui se déroulaient à l'Institut Pasteur de Paris et auxquelles j'assistais.
ANNEXE
REH n°15 du 14 avril 2006 (Relevé épidémiologique hebdomadaire de l'OMS) [5]
« Poursuivre la vaccination par le VPO une fois la transmission du poliovirus interrompue dans le monde ne serait pas compatible avec l’éradication, dans la mesure où elle pourrait potentiellement conduire à la réémergence de la poliomyélite, du fait de la capacité des virus vaccins Sabin à muter et à acquérir une plus grande transmissibilité et une plus grande neurovirulence. »
« La poursuite de la vaccination par le VPO, soit seule, soit associée au VPI*, n’est pas possible car elle conduirait inéluctablement au rétablissement de la transmission des poliovirus dans le monde et réduirait à néant tous les efforts de l’initiative d’éradication de la poliomyélite.
Elle pourrait également être associée, d’après une modélisation soigneuse et une analyse coût/efficacité, au nombre de cas attendus le plus élevé des 3 scénarios étudiés (poursuite du VPO systématique, passage au VPI universel, ou absence de vaccination contre la poliomyélite) pour la période de l’après-VPO, en raison de la charge de morbidité bien connue des flambées de PPAV*, ou de celles dues à des virus dérivés de souches vaccinales excrétés par des sujets immunodéficients et à des virus circulants dérivés de souches vaccinales. »
* VPI vaccin polio inactivé (injectable) ; PPAV Polio paralytique associées à la vaccination
« D’après les données actuellement disponibles, l’OMS ne recommandera pas l’utilisation universelle du VPI en raison de ses coûts réels et d’opportunité très élevés pour les pays exempts de poliomyélite. »
C'est pourtant ce qu'elle fera un peu plus tard … Ces contradictions témoignent que l'OMS est bien le dos au mur.
REH n°23 du 4 juin 2010 [6]
« Étant donné les progrès réalisés en vue de l’éradication de la poliomyélite, de nombreux pays industrialisés sont dernièrement passés de l’utilisation du VPO à celle du VPI dans les programmes de vaccination systématique, principalement afin d’éliminer le poids de la poliomyélite paralytique associée au vaccin (PPAV), une manifestation indésirable rare associée au VPO. »
Les paralysies poliomyélitiques associées à la vaccination (PPAV) sont donc qualifiées de ''rares'' tout en reconnaissant qu'elles provoquent des ''flambées''... Leur fréquence étant suffisante pour conduire ou même contraindre à l'abandon du vaccin oral en raison d'une ''charge de morbidité bien connue''.
Une étude en français [7] sur les conséquences de la pression vaccinale sur le monde des entérovirus avait été exposée les 14-15 octobre 1999 à l'Institut Pasteur de Paris. Elle s'intitulait :
"Campagne intensive de vaccination avec le vaccin polio oral :
quelles répercussions sur le monde des entérovirus ? "
On y lit :
« Dans la phase de pré-éradication de la poliomyélite qui s’amorce avec le nouveau millénaire, se posent cependant deux problèmes de génétique et d’écologie virale qui pourraient compromettre l’opération, sinon amoindrir les bénéfices attendus.
D’une part, la mise en évidence de quelques souches vaccinales mutantes ayant circulé durant une longue période suggère que le VPO pourrait entretenir un réservoir de souches pathogènes et être un obstacle à l’éradication du virus. »
C'est la problématique majeure de l'éradication de la polio : l'instrument choisi pour cette éradication - le VPO - est en même temps l'instrument du maintien de la polio ! Comme ces campagnes massives en 1999 se sont encore considérablement intensifiées depuis, les problèmes posés n'ont pu que s'aggraver.
Les auteurs poursuivent :
« D’autre part, dans le cas où l’éradication de la poliomyélite serait cependant établie, il paraît dorénavant souhaitable d’anticiper sur l’évolution des entérovirus dans un monde sans poliovirus, et d’évaluer dans quelle mesure les entérovirus non-polio (ENPV) pourraient être à l’origine de nouvelles souches épidémiques particulièrement pathogènes pour l’homme. »
Autrement dit, la cessation de la circulation des poliovirus pourrait s'accompagner de la création de nouvelles souches d'entérovirus particulièrement dangereuses …
Le REH du 10 juillet 2009 [4] est consacré à la polio en Inde. Il dressait le bilan de l'efficacité des vaccins oraux en Inde :
« L’Inde a signalé un total de 874 cas dus au PVS* dans 13 États en 2007 et 559 cas dans 13 États en 2008. Du 1er janvier 2009 au 29 mai 2009, 59 cas dus au PVS ont été signalés par 4 États; 279 cas avaient été signalés pendant la même période en 2008. Parmi les cas notifiés en 2007-2008, 867 (61%) concernaient des enfants âgés de <24 mois et 44 cas (3%) des enfants de >5 ans. Un total de 1108 cas (77%) notifiés en 2007-2008 avaient reçu plus de 7 doses de VPO*; 265 (18%)ont signalé avoir reçu 4 à 7 doses; 40 (3%), 1 à 3 doses, et 20 (1%) soit n’avaient reçu aucune dose soit ignoraient le nombre de doses reçues. »
*PVS : polio virus sauvage; VPO : vaccin polio oral.
C'est donc un total de 1492 cas de 2007 au 29 mai 2009 dont les ¾ avaient reçu plus de 7 doses...
Pendant des années, l'OMS avait martelé que la persistance de la polio, en particulier en Inde, était liée à une couverture vaccinale insuffisante. Quand il fut établi que plus des ¾ des cas avaient reçu plus de 7 doses de vaccin oral, cette affirmation n'était plus tenable. La Directrice générale de l'OMS avait alors envoyé une commission pour étudier la faisabilité et les obstacles à l'éradication de la polio. Elle a consigné ses observations et recommandations dans un document [8] publié le 20 octobre 2009. Il s'intitule :
« Évaluation indépendante des principaux obstacles à l’interruption
de la transmission du poliovirus »
«On retrouve dans les principaux obstacles techniques à l’éradication le fait que certains cas de poliomyélite se sont produits chez des enfants qui avaient reçu plus d’une dizaine de doses de VPO. »
Plus spécifiquement en Inde
« La transmission est favorisée par les conditions environnementales prévalant dans toutes les zones visitées où la circulation du poliovirus sauvage persiste: défécation n’importe où, contamination de l’approvisionnement en eau, surpopulation extrême (avec une densité de base de 1000/km2 dans la zone de la Kosi, les populations rurales doivent encore s’entasser sur un dixième de leur territoire au moment des inondations qui accompagnent la mousson). À tous ces facteurs s’ajoutent une prévalence très élevée de la malnutrition, l’insalubrité des aliments d’appoint et un taux de natalité très élevé, avec un espacement des naissances de seulement un an dans certains cas. Dans ces conditions, la vulnérabilité des plus jeunes à la poliomyélite et à d’autres infections par des entérovirus devient manifeste. »
« Si une amélioration générale de l’assainissement semble très improbable dans un avenir prévisible, l’attention portée à la salubrité de l’eau et à l’hygiène, en particulier pour les moins de 2 ans, est une intervention utile à examiner. Plus précisément, aucun puits tubulaire dans la zone de la Kosi n’était protégé par des socles ou des plates-formes et nombre d’entre eux étaient entourés d’eau sale stagnante. On nous a dit qu’on avait mis en évidence E. coli*, signe de contamination fécale, dans 80% des puits de cette zone. »
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Il s'agit du colibacille Escherichia Coli présent dans l'intestin sous formes généralement non pathogènes. Cependant, certaines souches peuvent être responsables de diarrhées chez le nourrisson.
« La persistance de la circulation de poliovirus sauvages malgré l’administration de nombreuses doses de VPO est préoccupante »
En fait la SEULE vraie solution aux problèmes est et restera la maîtrise de l'eau consommée par les populations. On aurait pu commencer par cela ? |
Contexte français
En France, le dernier cas de poliomyélite autochtone remonte à 1989 et le dernier cas importé en 1995, tous deux concernant des adultes. Le dernier isolement de poliovirus sauvage chez un sujet n’ayant pas voyagé récemment remonte aussi à 1989. Une extrême vigilance reste toutefois nécessaire, en vérifiant et en mettant à jour le statut vaccinal de toute personne se rendant dans un pays où circulent des PVS. De plus, le risque d’une possible réintroduction de poliovirus en France n’est pas exclu, en raison de la persistance de foyers épidémiques dans le monde. Si la couverture vaccinale vis-à-vis de la poliomyélite est très élevée dans les tranches d’âge les plus jeunes (entre 99 % à 2 ans et 90 % à 15 ans), elle reste sub-optimale chez l’adulte (66 % en moyenne). Les résultats d’une enquête de séroprévalence réalisée en 1998 en population générale, avaient montré une proportion de sujets âgés séronégatifs proche de 20 %, plus marquée pour le sérotype 3.
L’identification la plus précoce possible de la réintroduction éventuelle d’un PVS sur le territoire français est aujourd’hui assurée par la surveillance renforcée des entérovirus chez l’homme et dans l’environnement, en complément de la déclaration obligatoire des cas de poliomyélite (Plan d’action de la Commission nationale de certification de l’élimination de la poliomyélite). Depuis 2000, la surveillance en clinique humaine a permis d’identifier, en l’absence de signes d’appel cliniques, 11 poliovirus vaccinaux (3 de type 1, 5 de type 2 et 3 de type 3) ainsi qu’un VDPV 2, sans reprise de virulence, tous importés. Aucun PVS n’a été identifié.
Dans l’environnement, au cours de ces 13 dernières années, des poliovirus vaccinaux de type 2 ont été détectés à 5 reprises (2000, 2003, 2004, 2006 et 2007) et de type 1 à 2 reprises (2001 et 2009). Le dernier isolement d’un PVS remonte à 1996, il s’agissait d’un sérotype 3.
Au niveau européen
L’élimination de la poliomyélite a été prononcée en juin 2002. Suite à la découverte de PVS1 dans les eaux usées d’Israël puis à la survenue de cas confirmés en Syrie, l’ECDC (European Center for Disease Prevention and Control) a évalué le risque d’importation de poliomyélite en Europe. Si ce risque a augmenté, il reste toutefois limité au vu des couvertures vaccinales élevées dans les pays européens.
“ce risque reste toutefois limité au vu des couvertures vaccinales élevées” :
la CV ne peut pas empêcher une importation ni s’opposer à la circulation du virus importé ! Elle peut seulement éviter des paralysies. Si à la suite d’une importation de virus sauvage on reprenait la vaccination orale, on réintroduirait des virus polio vivants dans les intestins. Ils pourraient ainsi circuler sauf si les mesures sur l’eau permettent de les stopper. Mais alors elles empêcheront tout aussi bien la circulationdu virus sauvage importé.
Exactement comme avec la fièvre aphteuse où la vaccination est interdite car les animaux vaccinés ne tombent pas malades mais peuvent transmettre le virus. C’est la pire des situations car on ignore où il se trouve et ainsi il se réinstalle en silence.
Donc en cas d’importation d'un virus polio sauvage il ne faudrait surtout pas utiliser le vaccin oral. Normalement, notre système de maitrise de l’eau consommée par les populations permettra d'éviter qu'il s'introduise dans le circuit de l'eau. On pourrait seulement justifier, tout au plus, la vaccination par le vaccin inactivé injectable du voisinage immédiat du malade si des contacts directs étaient possibles.
[1] http://www.who.int/immunization/diseases/poliomyelitis/endgame_objective2/oral_polio_vaccine/fr/
[2] http://www.who.int/bulletin/volumes/90/7/12-020712/fr/
[3] http://www.who.int/wer/2016/wer9106.pdf?ua=1
[4] http://www.who.int/wer/2009/wer8428.pdf
[5] http://www.who.int/immunization/wer8115polio_Apr06_position_paper_sup.pdf
[6] http://www.who.int/wer/2010/wer8523.pdf
[7] http://www.pathexo.fr/documents/articles-bull/T93-3-2155-RIP2.pdf
[8] https://www.docdroid.net/rA7ybzM/polio-evaluation-confr.pdf
[9] https://www.medecinesciences.org/fr/articles/medsci/pdf/2013/11/medsci20132911p1034.pdf
Francis Delpeyroux et al. « Éradication de la poliomyélite et émergence de poliovirus pathogènes dérivés du vaccin. De Madagascar au Cameroun »
Volume 29, Numéro 11, Novembre 2013 Le réseau international des Instituts Pasteur