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La Question des Vaccins
18 juillet 2008

Vaccin Hépatite B et SEP : les données étaient sans doute très probantes...



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Vaccin Engerix B : le quart de la commission de pharmacovigilance ne soutient pas  ses conclusions

26 septembre 2008 Vaccin hépatite B et sclérose en plaques : il n'y a pas que les enfants



Chacun a sans doute pu lire ou entendre de nombreux témoignages faisant état de l’apparition des premiers symptômes de sclérose en plaques (SEP) dans les premiers jours ou premières semaines qui suivaient la vaccination contre l'hépatite B. Cette particularité montrait qu'il ne devait pas être nécessaire de suivre les vaccinés sur une durée de plusieurs années, ni même d'une année, pour mettre en évidence l'existence d'un lien fort entre la vaccination et le début de la maladie. Cela apparaît en contradiction avec l'étude d'Hernan qui avait dû prolonger cette durée jusqu'à 3 ans pour obtenir une différence significative. Cette apparition précoce des premiers signes de la maladie, peu de temps après la vaccination, avait d'abord été confirmée de façon très claire  par l’OMS dans le REH du 22/11/2002 :

 

«En 2001, plus de 700 cas d’affections démyélinisantes du système nerveux central dont la distribution épidémiologique était proche de la distribution naturelle de la sclérose en plaques ont été signalés aux autorités françaises, la plupart chez des femmes adultes. Le délai entre la dernière dose de vaccin et l’apparition des symptômes neurologiques allait de 1 jour à 5 ans (délai médian: 60 jours).»

 

Le délai médian de 60 jours signifie que la moitié des cas étaient apparus dans les 2 mois qui suivaient la vaccination. Il y a là un fait très fort qui contient sûrement une partie importante de la clé du problème. Il y a aussi cette affirmation du bilan de la commission nationale de septembre 2004 qui précise et complète les informations de l’OMS et qui ne peut qu'interpeller très fortement :



« Le bilan des cas notifiés au réseau national des centres régionaux de pharmacovigilance, aux laboratoires et à l’association de patients REVAHB (Réseau Vaccin Hépatite B) recense :

- un total de 1110 cas d’affections démyélinisantes centrales, dont 898 cas de sclérose en plaques (SEP), signalés depuis la mise sur le marché des vaccins contre l’hépatite B jusqu’au 31 décembre 2002. Respectivement 43,5%, 79,2% et 94,4% d’entre eux sont survenus dans les 2 mois, 12 mois et 3 ans suivant la vaccination.

  • L’examen des caractéristiques de ces observations de SEP en termes d’âge, sexe, forme clinique, facteurs de risque, délai d’apparition et type d’atteinte neurologique ne permet aucunement de les différencier des SEP classiques, ni d’affirmer la responsabilité du vaccin dans leur survenue. »

 

Voici une présentation de ces données sous forme de tableau :

 

 

Durée d’observation

2 mois

10 mois

24 mois

Total

Cas observés en % de 1110

43,5%

35,7%

15,2%

94,4%

Cas observés

483

396

169

1048

Cas attendus

58,22

291,11

698,67

1048

 

Les calculs ont été effectués ainsi : 1048 représente 94,4% des 1110 cas enregistrés, c'est à dire ceux apparus dans les 3 ans qui suivent la vaccination. La ligne des "cas observés" a été obtenue en prenant respectivement  43,5%, 35,7% et 15,2% de 1110, soit les nombres 483, 396 et 169 qui ont été notifiés à la pharmacovigilance pour les durées successives de 2 mois, 10 mois et 24 mois  après la vaccination, soit 36 mois en tout.

Supposons d'abord que les notifications aient été exhaustives : 

Si le vaccin est sans action sur l’apparition des symptômes de SEP ou d'autres affections démyélinisantes,  la répartition de ces 1048 cas notifiés sur une période de 36 mois devrait se faire à peu près en proportion des durées d’observation de 2 mois, 10 mois et 24 mois. Cette règle des proportions donne les "cas attendus" pendant une période de 2 mois, soit 1048/18=58,22. Pour les périodes  de 10 et 24 mois on devrait en avoir à peu près 5 fois plus, soit 291,11 et 12 fois plus, soit 698,67.

 

La comparaison pourrait se passer de commentaires : inutile d’effectuer des calculs de probabilités pour apprécier si  les différences constatées entre les cas observés et attendus pourraient être attribuées à de simples variations aléatoires.{On peut effectuer un test du Khi-2  dont la conclusion est évidemment sans ambiguïté.} Cela signifie qu'il est extrêmement peu vraisemblable d'accepter que seules des variations aléatoires seraient à l'origine des écarts observés et qu'il est donc très opportun de rechercher une cause agissante particulière. Cependant, cela ne signifie pas automatiquement que cette cause serait le vaccin, on pourrait imaginer une éruption solaire ou une éclipse de lune ! Mais les vaccinations se répartissant sur plusieurs années cela ne serait guère convaincant ! Aussi,en l’absence de tout autre cause plausible, il paraît difficile d'exclure le rôle du vaccin dans l’augmentation considérable du nombre de cas dans les 2 mois qui suivent la vaccination.

 

On pourrait présenter le problème d'une façon qui paraîtra peut-être plus simple et convaincante même si elle ne respecte pas la méthode statistique : on peut dire qu’il a été notifié 6 fois plus de cas pendant les 2 premiers mois qu’en moyenne au cours des 5 périodes de 2 mois qui ont suivi {la valeur moyenne pour ces 5 périodes est 396/5=79,2 et 483/79,2 donne à peu près 6}. Le même calcul avec 169 pour les12 périodes de 2 mois donne un rapport supérieur à 34 !

Si on regroupe les cas sur la première année, soit 483+396=879 et que l’on compare à chacune des 2 années suivantes en prenant la valeur moyenne 169/2=84,5 on obtient le rapport de 10,4 ! On peut donc dire qu’il a été déclaré à la pharmacovigilance française plus de 10 fois plus de cas au cours de la première année qui suit la vaccination que pendant chacune des 2 années suivantes en estimant par la valeur moyenne faute de plus de précisions. Mais il reste cependant possible que ce soit par exemple 8 fois plus par rapport à la seconde année et 12 fois plus par rapport à la troisième.

Objection ! Des notifications non exhaustives.

 

Les cas attendus présentés ici ont été calculés à partir des cas notifiés à la pharmacovigilance mais on peut objecter que les variation énormes observées pourraient seulement traduire la diminution du zèle des médecins à notifier des cas quand la date de la vaccination s'éloigne... Peut-on calculer les cas attendus sur une période de 2 mois en supposant que le vaccin n'ait aucune action ? La prévalence de la SEP, c'est à dire le nombre de cas vivants à un moment donné, a été évaluée avant 1990 en France. Il en est fait état dans le Livre Blanc de la SEP publié en 2006 et en ligne sur http://www.arsep.org/_files/78.pdf On y lit qu'elle avait été évaluée à 40 pour 100000 soit 24000 pour 60 millions d'habitants. L'incidence annuelle avait aussi été évaluée à 4,3 pour 100000, ce qui est contestable car incohérent avec la prévalence comme on le verra plus loin.

Mais acceptons d'abord cette valeur qui donne une incidence globale annuelle de 2500, soit une incidence de 417 pour 2 mois. On admet qu'un peu moins de 50% de la population avait été vaccinée pendant la période considérée, soit 208 cas attendus de SEP pour la moitié de la population suivie sur 2 mois. On ne peut comparer directement aux 483 cas recensés puisqu'ils incluent d'autres affections démyélinisantes que la SEP, mais on sait qu'il y avait 898 SEP parmi les 1110 cas notifiés, aussi, faute de mieux, on peut proposer de corriger 483 par 898/1110 soit 391 SEP contre 208 attendus, ce qui met en évidence un sur-risque très important de SEP dans les 2 mois qui suivent la vaccination. 

 

Les 483 cas enregistrés dans les 2 mois qui suivent la vaccination ne peuvent être considérés comme surestimés puisqu’ils ont fait l’objet d'une déclaration à la pharmacovigilance par des médecins et qu’en pareils cas ces déclarations sont généralement contrôlées. Par contre ils pourraient être sous-estimés ce qui n'est sans doute pas le cas pour l'incidence de 4,3 SEP pour 100000 qui est incohérente avec la prévalence de 40 pour les 2 raisons suivantes que l'on trouve dans le Livre Blanc :

 

1- La SEP n'a que rarement une influence sur l'espérance de vie des malades.

2- La SEP apparaît le plus souvent chez des adultes jeunes (85% des cas avant 44 ans; 60% à 34 ans).

3- La SEP touche beaucoup plus fréquemment les femmes que les hommes (environ 70% de femmes) et elles ont une espérance de vie plus grande que les hommes.

 

Il en résulte que l'espérance de vie des malades devrait être en moyenne d'au moins 30 ans après le début des symptômes et que la prévalence devrait donc être au moins égale à 30 fois l'incidence, d'où l'incohérence flagrante entre 4,3 et 40. Faut-il corriger l'incidence ou la prévalence ? L'incidence n'a été évaluée qu'une seule fois à Dijon sur 94000 adultes de moins de 60 ans alors que la prévalence a donné lieu à plusieurs études. De plus, évaluer l'incidence sur seulement 94000 personnes est une mission quasi impossible en raison de la faiblesse de l'échantillon eu égard aux valeurs très faibles de l'incidence annuelle : en effet, il devait y avoir environ une quarantaine de SEP parmi ces 94000 adultes ayant entre 20 et 59 ans et  répartis sur 40 années de naissance. Cela faisait 1 cas en moyenne par année avec sans doute beaucoup d'années avec zéro cas, d'autres avec 1, 2, 3 ou 4 cas, ce qui permet de dire que l'étude ne pouvait être fiable.

 

Par contre l'étude de la prévalence évite cette difficulté et peut donc être considérée comme plus fiable. Aussi, faute de mieux, on pourrait proposer de diviser la prévalence par 30 pour avoir une évaluation de l'incidence annuelle. Partant d'une évaluation de la prévalence à 40/100000 on obtient une prévalence globale de 24000 SEP pour 60 millions d'habitants soit une incidence annuelle de 800 en divisant par 30. Pour l'appliquer à un peu moins de 50% de vaccinés on doit encore diviser par 2 puis par 6 pour obtenir l'incidence sur 2 mois, soit 66 à comparer aux 391 SEP notifiées, ce qui donne un risque multiplié par près de 6, L'essentiel ici n'est pas de mesurer le sur-risque de SEP après vaccination mais de constater que son existence est bien mise en évidence et ce même avec la valeur plafond de 208 qui laisse encore une marge confortable par rapport à 391.

 

Cette marge, on pourrait l'utiliser en prenant une incidence de 6,5/100000 donnant une incidence globale annuelle de 3900, soit 325 SEP attendue sur 2 mois pour les 50% de vaccinés. L'écart avec 391 reste encore très significatif (on peut tester par une loi de Poisson de paramètre 325; la probabilité d'avoir au moins 391 est de l'ordre de 1/2500).  Avec l'autre mode de calcul proposé pour l'incidence on pourrait aussi prendre une prévalence de 60/100000 puisque c'est la valeur retenue par l'Afssaps dans son étude de février 2000 (http://afssaps.sante.fr/pdf/6/vhbrap.pdf), ce qui revient à remplacer les 66 SEP attendues par 100 à comparer à 391.

On voit qu'on dispose d'une marge très confortable qui pourrait supporter des  réévaluations importantes de l'incidence jusqu'à 7/100000 qui donne 350 SEP attendues pour lesquelles 391 donne un écart encore significatif (1,64%). Les évaluations de l'incidence effectuées après l'an 2000 sont inférieures à 7.

 

Avec de telles données on est en droit de se demander comment les experts ont pu ne pas s’apercevoir du problème !

 

Comment en effet ont-ils pu écrire que "le délai d’apparition"  ne permettait pas "d’affirmer la responsabilité du vaccin" ?

 

Certes, si affirmer veut dire certitude absolue on peut toujours discuter mais ce serait plutôt de la mauvaise foi. Disons, pour s'exprimer de façon plus nuancée, qu'il n'était pas possible d'écarter la responsabilité du vaccin. En fait ils avaient bien vu qu’il y avait sans doute un problème puisque au cours de la seconde journée sur la veille sanitaire organisée le 30 novembre 2007 par l'Institut de veille sanitaire,  j’ai assisté à plusieurs communications sur le thème des vaccinations dont celle de Mme A.Castot du département de l’Afssaps chargé de la surveillance du risque ainsi que du bon usage et de l’information sur les médicaments. Le titre de sa communication dont on peut lire le résumé sur le site de l'InVS  « La pharmacovigilance des vaccins aujourd’hui et les leçons de la vaccination contre l’hépatite B ». J’avais pris quelques notes à la volée et, en m’aidant du résumé, j'avais proposé un article dont j’extrais les points suivants :

 

Le rejet de l'Europe

Mme A. Castot nous dira «que les premiers cas d’atteintes neurologiques ont été rapportés au réseau pharmacovigilance dès fin 1993» soit donc un an avant le grand lancement de la campagne contre l’hépatite B par le ministre en octobre 1994. La France a alors présenté à l’Europe ses premières constatations sur les risques du vaccin hépatite B qui apparaissaient dans notre pays. Mais, nous dira-t-elle, les observations et propositions françaises ont été fermement rejetées par les autres pays  et tout particulièrement par l’Allemagne. L’expression "Rejet de l’Europe" apparaît alors en rouge sur l’écran reproduisant les grandes lignes de son exposé. J’ai vraiment eu l’impression qu’elle regrettait cette attitude des autres pays européens. Il faut savoir que l'EMEA, l'agence européenne du médicament, est maintenant dominante et que tout doit remonter à l'Europe et être discuté à ce niveau.

 

La leçon retenue

Les études préliminaires, avant l’obtention de l’AMM, étant réalisées sur un nombre limité de personnes, elles ne peuvent exclure des effets nocifs pouvant apparaître sur des populations plus importantes. Aussi, «on doit admettre la possibilité de risque émergent après l’obtention de l’AMM» dira encore Mme Castot qui souligne encore «la nécessité de connaître l’épidémiologie de la maladie prévenue par le vaccin» et reconnaît d’une manière générale «une sous notification très nette des effets indésirables des vaccins»  ainsi que la nécessité «de faire de la détection de signal» afin de dépister le plus tôt possible «un risque émergent après AMM». Elle souligne la nécessité d’avoir «une démarche plus prospective» pour capter «un signal faible, pour ne pas attendre trop longtemps». 

 

Il est tout de même assez étonnant qu’un vaccin qu’on nous présente aujourd’hui comme inoffensif ait pu provoquer une telle agitation si tout n’avait été que coïncidence…  

 

Une sous-déclaration avérée

 

L'augmentation du risque dans les 2 mois qui suivent la vaccination paraît presque acquise, ou du moins les experts, avec les données plus précises dont ils disposent devraient (auraient dû) pouvoir réaliser des études convaincantes. On peut maintenant se demander si le risque s'atténue avec le temps ou si c'est le zèle des médecins à déclarer les cas qui s'affaiblit avec le temps. En effet, les données notifiées  suggèrent une réduction progressive du risque au delà de 2 mois mais peut-on valider cette constatation apparente ?

 

D'abord, le sur-risque de SEP peut-il être mis en évidence sur la seconde période de 10 mois ? Il a été notifié 396 cas corrigés par 396x898/1110=320 SEP. 400 SEP attendues sur 12 mois pour 50% de vaccinés donne 333 SEP attendues sur 10 mois. On voit ici que le nombre de cas attendus le plus faible parmi ceux que j'ai déjà utilisés (incidence globale de 800), dépasse le nombre de cas notifiés ce qui montre qu'on ne peut mettre en évidence le sur-risque sur cette période avec ces données mais laisse aussi supposer une possible sous-notification médicale même si la différence n'est pas significative.

 

Elle va le devenir sur la période suivante de 2 ans avec seulement 169 cas déclarés donnant au plus 169 SEP à comparer à 400x2=800 SEP attendues. Il n'y a pas photos, les médecins ont très largement sous-déclaré c'est quasi certain. On a donc pratiquement la preuve  qu'au delà d'un an, et sans doute avant, les médecins ne remplissent que trop rarement les formulaires de notification à la pharmacovigilance. Peut-être pensent-ils qu'après un tel délai le vaccin est exonéré ?

 

Si la réduction du risque de SEP avec le temps paraît plausible, ces données ne permettent pas de l'étudier en précisant par exemple la durée au delà de laquelle ce risque s'atténuerait sensiblement car nous n'avons pas de données intermédiaires, à 4 mois par exemple, et la sous-notification est vraiment beaucoup trop importante.

 

Pas de réduction du risque au delà des 2 premiers mois après vaccination ?

 

On peut a contrario envisager l'hypothèse que le risque de SEP se maintiendrait indépendamment de la durée écoulée depuis l'injection. Pour avoir autant de cas sur 10 mois et 24 mois que 483 en 2 mois il en faudrait 483x5=2415 et 483x12=5796 sur ces 2 périodes, soit 8494 cas sur 3 ans au lieu des 1048 notifiés, ce qui serait énorme. En fait, d'un point de vue statistique, c'est à dire en gérant les variations aléatoires possibles, il suffirait de prendre 2200 et 5300 cas au lieu de 2415 et 5796 pour gommer la différence significative entre les 2 premiers mois et les autres (vérifié par le test du khi-2). Par contre, avec seulement 2000 et 4500 les écarts entre les 2 premiers mois et les périodes suivantes resteraient très significatives (test du khi-2).

 

 

Durée en mois

2

10

24

Total

Nombre de cas : écarts non significatifs

483

2200

5300

7983

Nombre de cas : écarts significatifs

483

2000

4500

6983

 

En convertissant en nombre de SEP par la correction 898/1110 (faute de mieux) on trouvera 1780 et 4288 SEP pour 2200 et 5300 cas, soit 391+1780+4288=6459 SEP  apparues dans les 3 années qui suivent la vaccination.

 

Il faudrait donc, en correspondance avec la valeur 483 (391 SEP) supposée exhaustive, au moins 6500 SEP apparues sur les 3 années qui suivent la vaccination au cours de la période des notifications, pour accepter l'absence d'écarts significatifs entre les 3 périodes considérées, et donc accepter un risque de même niveau tout au long de ces 36 mois. Il faudrait alors confronter ces cas supposés avec ceux qui se sont effectivement produits pour trancher cette question. Je ne peux répondre à cette question.

 

En résumé :

 

1- Si on compare sur 2 mois les cas attendus chez les non-vaccinés avec les cas notifiés chez  les vaccinés dans le même délai  après la vaccination on est pratiquement obligé de mettre le vaccin en cause.

 

2- La sous-notification des cas au delà de 2 mois est avérée.

 

3- Si le sur-risque mis en évidence sur les 2 premiers mois après la vaccination se maintient pendant les 3 années qui suivent, on doit admettre une sous-notification énorme faite par les médecins à la pharmacovigilance sur cette période, ce qui rend l'hypothèse peu vraisemblable.

 

4- Et si on l’acceptait malgré tout, alors c’est le nombre très important de cas  nécessaires chez les vaccinés qui pourrait poser problème. 

 

 

 

Et au delà de trois ans ?

 

Je n'ai pas utilisé la quatrième donnée, c'est à dire au delà de la période de 3 ans et pour laquelle il y a seulement eu  62 cas notifiés. Mais cette durée est non précisée et sans doute indéterminée car elle dépend de la date de vaccination qui est variable. C'est pourquoi je l'ai dans un premier temps laissé tomber. Si là aussi on voulait rétablir l'équilibre ça pourrait chiffrer très vite ! Supposons cette durée de 3 ans en moyenne, ce qui ne paraît pas excessif*. Cela demanderait alors au moins 6500 cas supplémentaires pour équilibrer les données avec le 483 (391 SEP) qui pourrait lui-même être sous-estimé. On arrive ainsi sans forcer outre mesure à 13000 SEP chez les vaccinés sur cette période de 10 ans quand il y en a 391 dans les 2 mois après la vaccination. Sans forcer car j'ai pris à chaque fois une valeur basse pour boucher le trou statistiquement parlant. En moyenne par rapport à 391 cela ferait 391x36=14076.

 

Mais ne perdons pas de vue que l'essentiel est évidemment de mettre en évidence le sur-risque après vaccination et que cela paraît possible quand on se limite à une durée de 2 mois. Le problème de savoir si ce sur-risque faiblit ou non par la suite, à quel moment il s'infléchit et avec quelle ampleur reste  secondaire.

 

*En effet chacun sait que la campagne vaccinale fut particulièrement intensive au début de la période considérée, de 1995 à 1997, ce qui laissait une longue plage après la vaccination, les données s'arrêtant fin 2002.


 

Les données françaises globales sur la SEP

 

Dans la revue Réalités & Vaccinations* de mai 2008 on trouve un article de l'expert Marc Girard sur la vaccination contre l’hépatite B. J’extrais de cette publication  les 4 parties suivantes que je vais ensuite commenter :

 

  1. Page 31, les données globales en France «il s’avère que la SEP est l’une des rares maladies ayant fait l’objet d’évaluations épidémiologiques en France, depuis une trentaine d’années. La dernière évaluation épidémiologique disponible avant la campagne de 1994 permettait de reconstituer un total de moins de 25000 SEP1. La première disponible depuis cette campagne fait état d’un total d’au moins 600002 : soit plus d’un doublement en l’espace d’une dizaine d’années. Depuis, toutes les sources françaises concordent pour situer le total aux alentours de 80000, voire 900003. Directement interrogée par mes soins, la Haute Autorité de Santé m’a renvoyé au Livre Blanc de la SEP (avril 2006) qui, après recensement de toutes les données disponibles, propose une fourchette entre 63608 et 84623

 

2- page 32, un petit calcul  «Moins de 30 000 SEP normalement attendues chez environ 60 millions de Français, ça fait moins de 15 000 normalement attendues dans la demi-population exposée au vaccin; si l’équipe Hernan a raison (triplement du risque), on devrait aboutir à 15 000x3=45 000 SEP une fois cette sous-population vaccinée; à quoi on ajoute les 15 000 SEP normalement attendues dans la demi-population non vaccinée, soit un total de 60 000. Et toc ! On retombe presque pile sur les estimations sanitaires.»

 

     3- page 32, un correctif au calcul «Un éventuel excès par rapport aux 60 000 théoriques attendus s’expliquant facilement par le fait que les femmes ont été en moyenne plus vaccinées que   les hommes, que le nombre de SEP normalement attendu dans cette sous-population était donc plus élevé et qu’en stratifiant par sexe le calcul précédent, on aboutirait facilement à une estimation supérieure à 60 000, largement susceptible d’expliquer un excédent qui pourrait aller jusqu’à 80 000 ou davantage.»

 

    4- page 24, les données globales en France «par comparaison avec le dernier recensement avant la vaccination, les estimations désormais le plus couramment acceptées quant à la fréquence des SEP font état d’une augmentation d’environ 25 000 (avant vaccination) à 80 000 –90 000 (aujourd’hui).»

 

Les références citées par l’auteur :

 

(1) Rev. Prat. 1991 ; 41 :1884-7      (2) Rev. Prat. 2002 ; 52 : 529-37  (3) Le courrier de la SEP 2007 (avril), n° 107. Tout prévoir 2007 (juin) n°382. Etc 

 

* Publié par LNPLV BP 816 - 74016 Annecy Cedex   

 

 

Un risque relatif multiplié par trois ou par cinq ?

 

Le Dr Marc Girard ne paraît pas suspect de chercher à minimiser l’épidémie de SEP en France depuis le lancement de la vaccination hépatite B dans notre pays fin 1994. Pourtant, il semble vouloir continuer à confirmer pour la France l’estimation réalisée par Hernan sur des données britanniques et qui avait conduit à mettre en évidence un possible  triplement du risque. Mais cela pourrait être trop  modeste, du moins pour la France, et incompatible avec les données et calculs qu’il a lui-même proposés comme on va le voir.

 

Reprenons donc le calcul de ce risque tel que proposé dans le §2 précité : alors que quelques lignes auparavant -rapportées ici dans le §1- l’auteur mentionne moins de 25000 SEP en référençant son affirmation, il prend un très généreux arrondi à 30000 pour effectuer son calcul. Pourtant, il mentionne cette valeur 25000 à 2 reprises -la seconde étant rapportée ici dans le §4- et, selon ses affirmations, elle est considérée comme l’estimation la plus couramment acceptée. Mais si on reprend son calcul avec 25000 et le risque 3 on obtient 12500x3=37500 auquel on ajoute 12500 soit 50000 et non pas 60000. Si on veut atteindre les 80 000 par ce calcul il faudra prendre beaucoup plus que 3 comme risque relatif. Avec 5 on obtient seulement 75 000 : 12500x5+12500=75000 et avec 6 on atteindrait 87 500 qui est encore dans la fourchette 80000-90000  envisagée par le Dr Girard. Avec 5,4 on obtient exactement 80 000.

 

Pour expliquer un excédent pouvant permettre d’aller de 60 000 à 80 000 et même au delà, le Dr Girard fait valoir que les femmes, qui ont un risque plus élevée de SEP que les hommes, ont été largement plus vaccinées qu’eux. Malheureusement il ne propose aucune donnée pour effectuer ce calcul et vérifier cette affirmation. Supposons, faute de données, qu’il y ait eu 2 fois plus de femmes vaccinées que d’hommes et que le risque de SEP pour elles soit le double de celui des hommes. Le calcul ne pose alors pas de problème particulier, c’est niveau école primaire :

 

On aura dans ce cas 20 millions de femmes vaccinées contre 10 millions d’hommes et les 30 millions de femmes feront  20 000 SEP contre 10 000 pour les 30 millions d’hommes. Cela fera 13 333 SEP attendues parmi les 20 millions de femmes qui seront vaccinées et 3 333 SEP parmi les 10 millions d’hommes, ce qui donne 16 667 SEP attendues parmi les 30 millions de vaccinés. Avec le triplement du risque par la vaccination on aura 16667x3=50 000 auquel on doit ajouter 30000-16667= 13333, soit 63 333 SEP. On est très loin des 80000 annoncées !  Même en supposant que sur 5 vaccinés il y ait 3 femmes, on trouve seulement 68976 cas, ce qui est encore très loin du compte. {Voir en annexe les formules pour ces calculs}.

 

Pour atteindre les 90000 il faudrait supposer que l’on vaccine toute la population pour pouvoir faire 30000x3=90000. C’est la valeur limite qu’il est possible d’atteindre par ce calcul avec de telles données (30 000 SEP avant vaccination et triplement du risque).

 

Mais comme le nombre initial de SEP avait été estimé à moins de 25000, on constate  que la valeur plafond en partant de 25000 sera 75000.  Dans ces conditions on voit mal comment il serait possible d’expliquer "facilement un excédent de cas pouvant aller jusqu’à 80 000 et davantage". En partant de 25000 SEP, avec 50% de vaccinés et en faisant la même correction relative aux femmes  on obtient 52778 SEP. On est donc vraiment très loin des 80000 et davantage. Et ce sans parler du fait que 50% de vaccinés c'est un maximum, il y en a eu sensiblement moins.

 

Par contre, en acceptant un risque relatif de 5,  en effectuant de la même façon la correction due à un plus grand nombre de femmes vaccinées, en supposant 50% de vaccinés et en partant de 25000 SEP au lieu de 30000 on obtient  80556 SEP.

 

Nous constatons donc qu’avec les données de base et les procédures de calcul communiquées par l’auteur, c’est vers un risque relatif de 5, voire supérieur à 5, qu’il faudrait désormais s’orienter pour la France et pour la période correspondante aux données.

 

Remarque 1 : C'est une remarque générale. La vaccination n’a pas été pratiquée dans tous les pays de la même façon, sur les mêmes populations, dans les mêmes tranches d’âges et ce qui s’est produit dans un pays n’est pas forcément transposable à un autre, en particulier pour la France et la Grande Bretagne. De plus, il pourrait exister entre les populations des différences génétiques ou biologiques aux conséquences inconnues quand on utilise un vaccin aussi sophistiqué que le vaccin contre l'hépatite B.

 

Remarque 2 : Bien entendu on ne sait pas combien il y avait de  vaccinés parmi les malades et c’est ce qui fait la différence avec une étude cas-témoins comme celle d’Hernan où chaque cas avait été validé après enquête. Mais cela avait aussi conduit à éliminer beaucoup de cas et à conduire à des nombres beaucoup plus faibles qui ont fait contester la sécurité et la représentativité de cette estimation (voir plus loin).

 

Remarque 3 : Il aurait été souhaitable que l’auteur précise sur quelles durées les 25000 et 80000 SEP annoncées avaient été estimées, l'essentiel étant que ces 2 durées soient égales. A priori on pourrait se demander s’il s’agit d’une incidence annuelle ou sur une autre durée ou s’il s’agit de la prévalence c’est à dire du nombre de cas vivants à un moment donné. Dans son article (page 34) l’auteur parle «du nombre de nouveaux cas estimé par le Livre Blanc de la SEP (avril 2006) aux alentours de 2500/an avant la campagne vaccinale». 2500 SEP par an cela ferait 25000 en cumulant sur 10 ans.  Il pourrait donc s'agir de l'incidence sur 10 ans. Compte tenu du délai d’enquête, de collecte et de publication on peut penser, faute de pouvoir le vérifier, que la fourchette proposée par ce même Livre Blanc  de 63608 à 84623 se rapporterait au cumul des cas sur 10 années entre 1995 et 2004 par exemple. Mais cela n’a malheureusement pas été précisé et c’était le devoir de l’auteur de le faire car s’il s’agissait de la prévalence il faudrait avoir conscience qu’elle peut augmenter même avec une incidence annuelle constante : il suffit pour cela de faire usage d’un médicament efficace prolongeant la vie des malades. Or, fin 1996 l’interféron a été introduit pour soigner les SEP comme le précise le Dr Girard.

Additif :

Au moment de la rédaction de cet article je n'avais pas connaissance du Livre Blanc de la SEP auquel le Dr Girard  se réfère. Il est en ligne sous 2 volumes, volume 1 : http://www.arsep.org/_files/78.pdf    et volume 2 : http://www.arsep.org/_files/77.pdf . On y apprend en particulier cette donnée très importante que la SEP abrège rarement l'espérance de vie des malades, ce qui est confirmé par exemple par un site suisse.

Comme la SEP apparaît souvent chez les adultes jeunes et avant 40 ans la plupart du temps, ce que le Livre Blanc confirme par ses statistiques, l'espérance moyenne de vie doit être d'au moins 30 ans, ce qui devrait impliquer que la prévalence soit au moins 30 fois l'incidence annuelle. Or on lit dans ce livre blanc, page 9, que «  à la fin des années 1990, on estimait que la prévalence du nombre de SEP en France se situait autour de 40 pour 100.000 habitants et l’incidence autour de 4 pour 100.000 », ce qui impliquerait une espérance moyenne de vie de 10 ans. Cette contradiction n'a pas été soulevée par les rédacteurs. Plus loin, page 13, on peut lire :

« Ceci a permis d’estimer la prévalence nationale de la SEP à 65,5/100.000 habitants (95% d’IC ; 62,5-67,5) dont 96,3 pour l00.000 femmes et 41,9 pour 100.000 hommes.

A partir de ces données, les auteurs ont extrapolé sur le territoire métropolitain, en avançant un chiffre de 63.608 patients atteints de SEP en France. En se basant sur des régions à forte prévalence (département de Meurthe-et-Moselle), on devrait dénombrer 84.623 patients en France

 

Il convient de rappeler que les études conduites avant les années 2000 (il s’agissait souvent d’études fragmentaires, régionales) suggéraient que l’incidence de la SEP était de l’ordre de 2 à 4 pour 100.000 pour une prévalence de l’ordre de 40 pour 100.000. Or les études plus récentes, du fait d’une meilleure accessibilité diagnostique et d’un meilleur suivi, montrent indiscutablement que ces taux sont à revoir. C’est ainsi que l’on peut penser que l’incidence se situe probablement entre 4 et 6 pour 100.000 habitants, avec des valeurs bien plus élevées pour la femme et une prévalence supérieure à 100 pour 100.000. Le chiffre de 50.000 personnes atteintes de SEP en France habituellement cité doit être réévalué, des chiffres compris entre 70.000 et 90.000 personnes étant probablement plus réalistes.

 

La prédominance féminine (71% de femmes) concerne toutes les tranches d’âges, avec un pic entre 30 et 49 ans ».

 

Page 151 :

« Plusieurs critères permettent de considérer que la Sclérose en plaques est un véritable problème de Santé publique :

La SEP est une maladie fréquente. Les données présentées au début de cet ouvrage montrent qu’il s’agit de l’affection neurologique handicapante évolutive la plus fréquente chez l’adulte jeune. Les projections réalisées à partir des données épidémiologiques récentes situent la prévalence vers 80.000 patients en France.

 

Ces chiffres, plus élevés que les estimations faites auparavant et les données de la littérature suggèrent une tendance à l’augmentation des chiffres d’incidence. Cette augmentation est très importante dans certains départements (Antilles) du fait des modifications environnementales et sanitaires récentes. En métropole, l’augmentation de cas identifiés peut être en partie liée à une meilleure reconnaissance et un diagnostic plus aisé mais repose également probablement en partie sur une augmentation réelle du nombre de sujets atteints. »

 

Il ressort donc de ces citations que les données utilisées par le Dr Girard étaient des prévalences. On peut comparer la prévalence en 1994 avec celle de 2004, une augmentation de celle-ci pouvant suggérer une action du vaccin mais on ne peut certainement pas utiliser le rapport de ces 2 prévalences pour tenter d'évaluer le sur-risque puisque la prévalence en 2004 peut comptabiliser des SEP apparues en 1980 par exemple. Or c'est cette opération contestable que propose le Dr Girard. Pour cela il était pour le moins impératif de comparer 2 périodes de même durée, l'une pendant la période de vaccination et l'autre avant.

 

De plus, les nombres proposés pour l'incidence annuelle et la prévalence sont contradictoires avec le fait que la maladie n'a que peu d'influence sur l'espérance de vie. En prenant une population de 60 millions d'habitants et une espérance moyenne de vie de 30 ans après le début de la SEP on obtient une évaluation de la prévalence en multipliant l'incidence annuelle pour 100000 par 600x30. Ainsi, une incidence entre 4 et 6 donne une prévalence entre 72000 et 108000; une incidence de 2 donne 36000; une prévalence de 25000 correspondrait à une incidence annuelle de 1,39 pour 100000. Une prévalence de 40 pour 100000 correspondrait à une prévalence globale de 40x600=24000 et à une incidence annuelle  globale de 800 ou de 40/30=1,33 pour 100000. Une prévalence de 100 pour 100000, comme envisagée dans le livre blanc, donnerait une prévalence globale de 60000.  Bien entendu tous ces calculs ne sont que purement indicatifs mais ils suggèrent assez bien une forte incohérence numérique que ni le Dr Girard ni les rédacteurs du Livre Blanc ne semblent avoir perçue.

Comment corriger ?

Puisqu'il est maintenant certain que les nombres utilisés par le Dr Girard pour faire ses calculs étaient des prévalences, voici comment il aurait pu faire. Je suppose que l'espérance de vie après début de SEP est de 30 ans, ce qui ne paraît pas excessif quand on sait qu'elle débute le plus souvent sur des adultes jeunes et qu'elle réduit rarement cette espérance. Je suppose aussi que l'on compare les prévalence à 10 ans d'intervalle, avant la vaccination (1994) et 10 ans plus tard, les 2 périodes auront alors en moyenne une plage commune de 20 ans.

 

Disons, pour faire simple et explicite, qu'on cumule les cas de 1965 à 1994 inclus puis de 1975 à 2004 inclus, soit la plage commune de 20 ans entre 1975 et1994. Je prends, comme le fait le Dr Girard, une prévalence de 30000 en 1994, soit 20000 cas communs aux 2 périodes. On attend donc 10000 cas de 1995 à 2004. Il prend 50% de vaccinés sur cette période, soit 5000 cas chez les non-vaccinés et 5000 attendus chez les vaccinés en supposant une répartition équilibrée. Le triplement du risque, c'est ce qu'il fait, donne 15000, soit en tout 20000+5000+15000=40000 cas et non pas 60000. Avec 60000=20000+5000+35000 c'est un risque multiplié par 7 et avec 80000 un risque multiplié par 11. De tels nombres, qui pourraient paraître trop élevés, ne sont pas incompatibles avec les données de la pharmacovigilance française comme exposé au début de cet article.

 

Ce calcul est évidemment très approximatif mais son objectif est seulement de souligner l'erreur de méthodologie faite dans ce calcul. Ce qui ressort de cela étant qu'une augmentation relativement faible de la prévalence peut correspondre à un sur-risque très élevé en raison du fait que la vaccination ne s'applique qu'à une faible part de cette prévalence : dans mon exemple, les 2/3+1/6 ne sont pas concernés par la vaccination; seul 1/6 des cas est concerné par celle-ci alors qu'elle a été appliquée à 50% . Le premier principe que m'ont appris les maths est d'abord de savoir de quoi on parle et de quoi on part et ceci est très utile ici. Nous constatons ici que même de petits calculs accessibles à un élève du primaire peuvent recéler des pièges quand les hypothèses sont floues ou non explicitées.

 

Y-a du travail pour les cancres !

Mon rôle n'est pas de me substituer aux experts mais de souligner, dans la limite de mes moyens et des informations données ou retenues, les failles et les manques dans les affirmations et les raisonnements des experts. J'agis un peu comme le cancre au fond de la classe qui attend la bourde du prof pour crier M'sieur, 2+2 ça fait pas 6 !!! Mon objectif n'est pas de prendre la craie pour faire l'expertise à la place de l'expert mais il faut bien qu'un cancre se dévoue pour dire certaine choses que les bons élèves n'osent pas dire tant ils ont peur d'être ensuite mal vus par le prof ! Ceux qui liront les différents articles de ce blog ou iront sur celui que j'ai réservé au BCG et à la tuberculose (catégorie expertise) verrons qu'y-a du boulot ! Si par exemple vous lisez "Cas évités par le BCG : un calcul très simpliste" vous verrez comment nos meilleurs épidémiologistes font usage de la règle de 3. C'est le célèbre problème de l'école primaire "3 choux coûtent tant, combien coûtent 10 choux ? ". Mais ce célèbre problème suppose que tous les choux soient au même prix, petit détail qui change tout quand on veut appliquer cette règle de calcul à une situation très contrastée comme l'est la tuberculose en France.

 

 

 

Retour sur l'étude d'Hernan

 

J'en avait déjà parlé dans un article de ce blog. Les conclusions de l'étude d'Hernan peuvent paraître bien modestes comparées à ce qui ressort ici. Rappelons qu'en limitant la durée d'observation à 1 an la différence entre vaccinés et non-vaccinés n'était plus significative dans l'étude de Hernan, ce qui est en contradiction avec les observations françaises comme l'OMS l'avait souligné :

 

«La date des premiers symptômes a été reliée dans l'étude à la dernière dose de vaccin donnée. Il n'y a aucune information fournie sur le nombre total de doses reçues, ni la date à laquelle les doses précédentes ont été administrées, excluant la possibilité d’évaluer un éventuel effet dose-réponse. La plausibilité biologique des résultats est mise en cause par l'observation que le risque de SEP est seulement apparu comme plus élevé plus d'un an après la dernière vaccination. Ceci n'est en accord ni avec l'hypothèse d'un déclenchement des SEP par la vaccination contre l'hépatite B, ni avec les données françaises de pharmacovigilance qui ont suscité cette étude.»

 

Il faut reconnaître que l'objection paraît exacte : si les observations françaises étaient transposables au groupe de population étudié par Hernan en Grande Bretagne il aurait dû disposer de beaucoup plus de cas au cours de la première année qui suivait la vaccination qu'ensuite. Or ce fut l'inverse, ou du moins il fut contraint d'allonger cette durée à 3 ans pour disposer de suffisamment de SEP chez les vaccinés (11 seulement malgré tout) pour atteindre un seuil de signification. Mais il y a au moins une explication à cette situation :

 

Trop de cas éliminés ?

Hernan disposait de 713 SEP mais il en a éliminé 550 pour au moins 2 motifs : la moitié, soit 225, parce que le diagnostic de SEP n'était pas suffisamment assuré et les autres parce que les cas n'avaient pas été enregistrés dans un logiciel bien défini au moins 3  ans avant le début des symptômes. Or les SEP ont été enregistrées entre 1993 et 2000, c'est à dire à une époque où l'informatisation des dossiers médicaux était encore à ses débuts. Imaginons par exemple une personne de la campagne anglaise qui, n'étant presque jamais malade,  ne consulte un médecin que très rarement et pour des problèmes mineurs. Se faisant vacciner contre l'hépatite B  elle ressent, quelques jours après, les premiers symptômes d'une SEP. Son cas étant alors enregistré dans le fichier informatique,  Hernan, depuis Boston aux USA, ne pourra retenir un tel cas car il n'aura pas l'assurance que les premiers troubles n'étaient pas apparus avant la vaccination. Cette exigence dans la définition des cas est certainement louable mais elle a pu fausser totalement la réalité. Il pouvait suffire d'éliminer  seulement une dizaine de cas de ce type pour tout changer. Cette élimination possible a pu être grandement facilitée par le fait que le taux de vaccination de la population étudiée était d'environ 2,5% alors qu'il dépassait largement les 40% dans la population française.

 

Qu'on soit pour ou contre le vaccin hépatite B on n'y peut rien, l'étude d'Hernan, -lancée justement en raison de l'alerte de la pharmacovigilance française pour les motifs développés au début de cet article- n'a pu aboutir à sa confirmation puisque Hernan a été contraint d'allonger la durée d'enregistrement des SEP après vaccination à une durée de 3 ans. En effet, limitée à un an après la vaccination l'étude n'était plus significative alors qu'elle aurait dû l'être de plus en plus en réduisant la durée à 1 an puis à 2 mois pour être en accord avec les observations françaises.

Une spécificité française ?

Sur son site le Dr Girard avance cet argument en faveur d'une possible spécificité française liée à une pratique vaccinale plus lourde que dans les autres pays et qui pourrait expliquer en partie l'importance qu'a pris en France la vaccination hépatite B :

 

« divers éléments ont pu contribuer à une « exception française » :

 

alors que depuis longtemps, divers observateurs ont évoqué un phénomène de surdosage pour rendre compte des complications du vaccin contre l’hépatite B, il est facilement reconstituable que le schéma retenu en France a été beaucoup plus lourd qu’à l’étranger, avec notamment une immunisation initiale en 4 injections (contre trois très majoritairement à l’étranger) et des rappels à cinq ans ignorés par la plupart de nos collègues étrangers. Or, nous avons l’expérience personnelle désormais assez fournie de sujets (notamment professionnels de santé soumis à un rythme très strict de rappels) ayant apparemment toléré sans problème les premières injections et développant des complications graves dans les jours/semaines suivant un rappel. »

Cela pourrait amplement justifier de ne pas chercher à appliquer à la situation française des résultats obtenus sur des données anglaises.

Il y a cependant une autre interrogation 

Les vaccinés avaient donc 3 ans pour débuter leurs symptômes alors que les non-vaccinés disposaient de 8 années pour le faire, entre 1993 et 2000. Chacun comprendra qu'il serait pourtant impératif que ces 2 durées soient identiques et il semble bien que l'on ait ici une problématique commune à toutes les enquêtes sur le sujet. Pour le comprendre clairement supposons que l'on puisse mener une véritable expérience sur le sujet :

 

Les conditions de l'expérience

Supposons une population homogène assez nombreuse et n’ayant jamais été vaccinée contre l’hépatite B.  Puis supposons que la moitié de cette population soit vaccinée le même jour J contre l’hépatite B et que pour des périodes données, 2 mois, 1 an, 3 ans par exemple, on surveille l’apparition des symptômes de la SEP.  On pourrait alors comparer les nombres de SEP apparues dans les 2 groupes vaccinés et non-vaccinés au cours de chacune de ces périodes. Irréalisable bien sûr car il faudrait d’abord avoir une population importante pour qu’il y ait suffisamment de SEP apparaissant dans les 2 mois et surtout que l'on puisse en vacciner la moitié le même jour, entre autres problèmes... Mais supposons !

 

Que montre alors ce protocole ? Qu’il faut bien entendu suivre les vaccinés et les non-vaccinés pendant la même durée. Il ne viendrait sans doute à l’idée de personne de comparer d’une part le nombre de SEP apparues chez les vaccinés dans l’année qui suit leur vaccination et de comptabiliser les SEP apparaissant chez les non-vaccinés pendant 5 ans. Et pourtant, c’est bien ce qui se produit en réalité mais comme les jours de vaccination sont répartis sur plusieurs années on ne s’en rend pas compte. Le jour J commun à tous, vaccinés et non-vaccinés, demeure pour les vaccinés en devenant le jour individualisé de leur vaccination mais il s'évanouit totalement pour les non-vaccinés. Comment en effet définir  un tel jour pour chacun d'eux ? A défaut et en admettant une répartition uniforme des SEP dans le temps en l'absence de toute cause particulière comme la vaccination, on pourrait corriger à la proportionnelle. Ainsi, les 152 SEP apparues chez les non-vaccinés sur 8 années pourraient être remplacées par 152x3/8=57. Cela revient à multiplier le risque de 3 obtenu par Hernan par 8/3, soit un risque de 8. Avec cette seule correction il serait possible que les données de Hernan restent significatives quand on limite la durée d'enregistrement à 1 an car on remplacerait, toujours selon ce calcul purement indicatif, 57 par 57/3=19 et ce même si 11 était remplacé par 7 ou même 6. En effet, toujours à titre indicatif, en corrigeant 19 par 2,43% c'est à dire la couverture vaccinale trouvée chez les 1604 témoins associés aux 163 SEP retenues (39 vaccinés), on obtient un risque de 13.

 

A la recherche du nombre perdu !

Je le répète, ces petits calculs sont là uniquement pour montrer la nature des défauts de ces études et l'orientation des corrections à apporter, pas pour donner "le bon résultat", en admettant qu'il existe. Je veux dire par là que la valeur du risque de SEP après vaccination peut dépendre de tant de facteurs qu'il sera sans doute impossible d'en proposer une qui serait universelle.

C'est un problème analogue à celui de l'efficacité du BCG : pendant des décennies les études se sont multipliées pour tenter de cerner la valeur de cette efficacité. Les unes annonçaient 80%, d'autres 50%, 30%, voire même négatives comme pour celle menée en Inde dans les années 70 avec de gros moyens. Aucun de ces experts qui multipliaient les études ou les commentaient  ne semblent avoir vu qu'ils cherchaient ainsi une valeur qui n'existe pas! Chacun comprendra en effet que le vaccin ne saurait avoir la même efficacité pour un enfant contaminé une fois occasionnellement dans l'autobus et pour celui qui est contaminé chaque jour en permanence par l'un de ses parents.

Cela avait été rigoureusement démontré dès les années 30  par des expériences sur les animaux : en faisant varier la dose de bacille de Koch qui servait à tester leur résistance les résultats étaient implacables. Il fut établi que la résistance conférée aux animaux par la vaccination chutait très rapidement quand la dose test augmentait. Pourtant, au cours de l'audition publique sur le BCG des 13-14 novembre 2006, où les meilleurs experts de notre pays étaient venus exposer le fruit de leurs études purement bibliographiques, aucun n'a fait la moindre allusion à ce problème fondamental.

La question était pourtant essentielle puisque l'objectif était non seulement de justifier l'abandon de la vaccination BCG généralisée et obligatoire mais aussi de justifier le maintien d'une vaccination ciblée sur les enfants à risque. Quelle sera l'efficacité du BCG sur un enfant vacciné à la naissance et en contact quelques jours après avec un tuberculeux contagieux vivant dans sa famille ? On a voulu accréditer l'idée qu'elle serait de l'ordre de 50%, efficacité calculée sur des groupes où une très grosse majorité d'enfants étaient à faible risque, -c'est à dire occasionnellement et le plus souvent modérément contaminés, quand cela se produit, -mais il est hautement vraisemblable que c'est complètement faux et que l'efficacité réelle dans ces conditions sera très faible voire négative comme cela fut constaté en Inde dans la région de Madras dans les années 70. Certains intervenants à cette audition sur le BCG voulaient même utiliser de tels arguments pour justifier le maintien de l'obligation vaccinale !!!

 

En médecine minuit ne sonne jamais !

Avec la polémique autour de l'étude de Hernan nous sommes un peu dans la situation suivante : le jour d'un référendum beaucoup de sondeurs d'un institut de sondage se mettent en grève, ce qui fait que l'échantillon dont dispose l'institut pour faire son annonce le soir à 20 h est à la fois trop faible et d'une représentativité mal assurée. L'intervalle de confiance autour de la valeur moyenne de 55% de oui est très grand (Hernan donnait une fourchette entre 1,5 et 6,3 pour le risque relatif). En réalité le oui va l'emporter avec75% des suffrages alors que l'institut annonce un modeste 55%. Les partisans du non ont une très bonne estimation du résultat mais ils la gardent secrète. Aussi, quand ils entendent que l'institut qui a pignon sur rue annonce seulement 55% pour le oui, ils jubilent car ils saisissent aussitôt l'exploitation qu'ils vont pouvoir en faire malgré leur cuisante défaite : ils s'empressent alors d'étudier les conditions de l'enquête pour y trouver les failles et les faiblesses qui s'y trouvent forcément. Ils sont habiles et choisissent des critiques justifiées sur la fiabilité de l'étude, allant même jusqu'à dire que cela n'exclut ni la victoire du non ni une beaucoup plus large victoire du oui*. Ainsi, ils paraissent d'une parfaite impartialité et, ce faisant, accréditent dans l'opinion du public et des autorités l'idée que le non pourrait l'emporter. A minuit, quand le résultat final tombera, ils feront profil bas mais le problème avec les enquêtes statistiques médicales est que les douze coups de minuit ne sonneront jamais !!!

 

 

*Cette analogie est exacte car les experts du Comité consultatif mondial pour la sécurité des vaccins, le GACVS, écrivaient à propos du résultat de Hernan, qu'il pouvait aller dans un sens ou dans l'autre.

 

Annexes

 

Traitement des données de Hernan par une loi de Poisson

 

Hernan avait présenté ses résultats en donnant un large intervalle de confiance à 95% pour mesurer le risque relatif de SEP après vaccination : [1,5  6,3]  autour de la valeur 3,1. En prenant 25000 SEP avant vaccination, comme l'indique le Dr Marc Girard pour la France, cela fait une fourchette de 6250 à 66250 SEP supplémentaires avec la vaccination, ce qui est très élastique il faut en convenir. La largeur de l'intervalle de confiance donne une idée de la puissance statistique de l'étude : plus il est large et plus elle sera faible. Dans une telle situation il peut être préférable de se contenter d'indiquer l'existence très significative d'un sur-risque de SEP après vaccination plutôt que de s'aventurer à vouloir le mesurer, ce qui ne fera que souligner la faiblesse de l'échantillon. Si un jour de référendum les sondeurs d'un institut de sondage se sont mis en grève et que l'institut ne dispose que de la fourchette [55%  75%] pour le oui il vaut mieux qu'il se contente d'annoncer une confortable victoire du oui plutôt que de souligner son problème. Il y a là un problème de communication.

 

La méthode statistique permet tout à fait de faire cela. La situation met donc en scène 2 groupes désignés par "vaccinés" et "non-vaccinés". Dans chacun d’eux le nombre de SEP qui peuvent se produire est soumis à des fluctuations aléatoires que l’on peut modéliser par des lois de Poisson caractérisées uniquement par leurs moyennes théoriques que je désigne ici par Mv pour le groupe des vaccinés et par M pour les autres. Les lois de Poisson sont des lois de probabilités qui sont certainement les plus adaptées pour un tel problème. Mv et M sont a priori inconnus et le problème sera seulement de décider si on peut penser que Mv est supérieur à M c'est à dire qu’il existe un sur-risque de SEP chez les vaccinés et nullement de chercher à évaluer le rapport Mv/M.

 

On a retenu 11 SEP chez les vaccinés contre 152 chez les non-vaccinés beaucoup plus nombreux. L’intervalle de confiance à 95% pour Mv et calculé à partir de 11 est [5,49   19,68]. Je l’ai calculé sur une machine programmée en utilisant directement la loi de Poisson. Je n’ai eu aucun recours à une approximation par une autre loi de probabilité comme cela était nécessaire quand les outils de calculs n’existaient pas. Malheureusement, les mœurs ayant la vie dure le recours à ces approximations est encore assez courant. Ici, les valeurs calculées sont très bonnes et on ne peut incriminer la faiblesse du 11 pour avancer des valeurs douteuses à ce sujet.

 

J’ai de même calculé l’intervalle de confiance pour M à partir de 152 qui est [128,80    178,17]. Les valeurs des 2 intervalles ne sont pas directement comparables car il y avait à peine 2,5% de vaccinés, soit 40 fois moins que de non vaccinés. On peut estimer la couverture vaccinale chez les témoins (ceux qui n'avaient pas de SEP) à partir des 1604 témoins retenus dont 39 vaccinés, soit un taux de 2,43%. Ces 1604 témoins ont été associés aux 163 SEP à raison de 10 pour 1 en tenant compte du sexe, de l'âge, de la profession et après tirage au sort. Ainsi, à une aide-soignante ayant fait une SEP on associe 10 femmes d'âges et de professions comparables; de même pour une mère au foyer. La raison est qu'une aide-soignante a beaucoup plus de chances d'avoir été vaccinée qu'une mère au foyer. S'il y a 3 aide-soignantes ayant fait une SEP on pourra leur associer moins de 30 témoins, ce qui explique pourquoi il y a seulement 1604 témoins et non 1630.

 

Faisons l’hypothèse que M=178,17, c’est à dire la valeur la plus grande de l'intervalle de confiance pour l’estimation de M. M étant une valeur théorique, 0,0243xM=4,329 donnera la moyenne théorique de SEP dans le groupe des vaccinés sous l’hypothèse que le vaccin n’a aucune influence sur la maladie. On est ainsi conduit à tester l’hypothèse Mv=4,329 quand on a observé 11 SEP dans ce groupe. Comme 4,329 n’est pas dans l’intervalle de confiance à 95% on est conduit à refuser l’hypothèse que le vaccin n’a aucune influence et donc à accepter qu’il en a une dans le sens d’un sur-risque. Par construction l’intervalle de confiance donne les valeurs de Mv qui sont acceptables au niveau choisi de 5% quand on a observé la valeur 11. On peut même tester à un niveau plus exigeant de 1% et qui conduit aussi au refus de l’hypothèse Mv=4,329 et à l’acceptation très significative de Mv supérieure à cette valeur, c’est à dire à l'existence d’un sur-risque chez les vaccinés.

 

Il est donc tout à fait indéniable que les données retenues par Hernan sont très significatives de l'existence d'un sur-risque quand on les traite en supposant qu'elles sont représentatives du groupe de population d'où elles sont issues. Mais comme on l'a vu on peut formuler certaines restrictions sur la représentativité de l'échantillon comme sur sa taille en raison d'un très faible taux de vaccination. Si on dispose d'une part de 100000 personnes dont 50% de vaccinées et d'autre part de 400000 dont 2,5% de vaccinés on peut se demander lequel des 2 échantillons offre la meilleure opportunité pour étudier le problème. Il faut pouvoir localiser le risque de SEP chez les vaccinés et non-vaccinés  avec la meilleure précision. Avec 50000 non-vaccinés contre 390000 l'avantage sera au second échantillon pour la définition du risque chez les non-vaccinés. Mais avec 50000 vaccinés contre 10000 l'avantage sera alors pour l'autre échantillon. Lequel des 2 faut-il préférer ? Le risque de SEP étant fort heureusement très faible, sur 10000 personnes on observera qu'un très petit nombre de SEP et sur 50000 il y en aura en moyenne 5 fois plus et ce sera beaucoup mieux. Chacun sait que c'est le maillon le plus faible qui donne la résistance d'une chaîne. Il en va un peu de même pour ces questions. En fait c'est l'échantillon de 100000 personnes dont 50000 vaccinés qui offrira la meilleure opportunité d'étude comme on va le voir maintenant.

Pour illustrer aussi simplement que possible ce dernier point supposons que le risque théorique de SEP soit de 1/3000 chez les non-vaccinés et de 1/1000 chez les vaccinés (triplement du risque). Sur 10000 vaccinés il y aura en moyenne 10 SEP contre 130 chez les 390000 non-vaccinés. En divisant 130 par 39 on obtient 3,33 SEP pour 10000 que l'on doit comparer à 10, ce qui est certes très significatif d'un sur-risque. Mais dans l'autre groupe on aura 50 SEP chez les vaccinés contre 16,67 en moyenne chez les non-vaccinés et on peut comparer directement 16,67 à 50 et là c'est beaucoup plus significatif de l'existence d'un sur-risque que dans le premier cas.

Disons que la sécurité de la décision est beaucoup plus grande car il y aura à peu près aucune chance pour que des variations aléatoires autour de 50 et de 16,67 puissent rendre les données observées non significatives alors que cela pourrait arriver avec des variations aléatoires défavorables autour de 10 et de 130 : le 10 théorique pourrait n'être qu'un 6 en valeur observée et le 130 théorique donner un 140 observé, soit 3,59 pour 10000; par rapport à 3,59 théorique le 6 cesse d'être significatif. Par contre, même si 16,67 donnait la valeur observée 25 et que 50 donnait 38 l'écart entre 25 théorique et 38 observé resterait encore très significatif.

On peut calculer et comparer les puissances statistiques des 2 situations précédentes : elle est de 99,90% pour l'échantillon de 100000 avec 50000 vaccinés contre 77,98% pour l'échantillon de 400000 dont 10000 vaccinés. Y-a pas photo ! Voir les calculs à la fin du § suivant.

 

 

La puissance statistique

 

Par définition, en l'adaptant à notre problème, la puissance statistique est la probabilité d'accepter l'existence d'un sur-risque de SEP après vaccination  quand ce sur-risque existe. Elle sera directement sous la dépendance de l'importance de ce sur-risque, de la fréquence de la maladie, de la taille de l'échantillon. Pour l'échantillon de vaccinés considéré par Hernan acceptons que 4 soit la moyenne des cas attendus de SEP si le vaccin est sans effet sur leur apparition (l'hypothèse nulle). On décide d'accepter l'existence d'un sur-risque si on observe au moins 9 SEP (la probabilité d'en avoir au moins 9 est 2,1%). En formulant une hypothèse sur la valeur du risque de SEP quand on est vacciné on pourra calculer la probabilité d'avoir au moins 9 SEP. Si ce risque est double, donc si la moyenne des cas après vaccination est de 8, la probabilité d'avoir au moins 9 cas sera 40,75%. Si le risque est de 3 elle sera de 84,5% et de 97,80% si le risque est de 4.

On voit ainsi clairement que plus le risque relatif de SEP après vaccination sera élevé et plus Hernan avait de chance de le mettre en évidence. Les experts de l'Afssaps et de la réunion de consensus de novembre 2004 ont admis que si le risque existait il ne pouvait être que faible. Admettons donc un risque "modéré" de 1,25 qui correspond à une moyenne de 5. Hernan avait alors 6,81% de chance pour le mettre en évidence et c'est ce qui s'est produit. Si on prend un risque de 1,1 soit 4,4 cas en moyenne, il y avait seulement 3,58% de chance pour Hernan de le mettre en évidence. En confrontant tous ces résultats qu'est-il le plus raisonnable de penser : que Hernan fut confronté à un risque faible de SEP ou à un risque au moins assez élevé ?

 

On pourrait de même étudier comment évoluent ces probabilités quand on double la taille de l'échantillon. La moyenne attendue est alors 8 et il faut remplacer 9 non pas par 18 mais par 15 (la probabilité d'avoir au moins 15 avec une moyenne de 8 est à peu près égale à celle d'avoir au moins 9 quand la moyenne est 4). Si le risque après vaccin est doublé, soit 16 en moyenne, la probabilité d'en avoir au moins 15 sera de 63,25% contre 40,75 précédemment. On mesure ainsi l'importance de la taille de l'échantillon. On obtiendrait le même résultat sur l'échantillon initial si la fréquence de la maladie était naturellement 2 fois plus élevée car cela doublerait aussi le nombre moyen de cas. C'est pourquoi on peut dire que la puissance statistique est plus faible  quand la fréquence de la maladie diminue.



  Risque relatif après vaccination

  1,1

1,25

   2

   3

   4

Puissance statistique avec moyenne théorique 4  en l'absence de vaccination et décision à 9 ou plus

3,58%

6,81%

40,75%

84,50%

97,80%

Puissance statistique avec moyenne théorique 8 en l'absence de  vaccination et décision à 15 ou plus

3,53%

8,35%

63,25%

98,00%

99,97%


Pour calculer la puissance statistique de l'échantillon de 400000 dont 10000 vaccinés dans les conditions indiquées dans le § précédent j'ai choisi la valeur 8 comme seuil de décision d'acceptation du sur-risque car la probabilité d'avoir au moins 8 SEP quand la moyenne attendue est 3,33 est 2,07% suffisamment faible. Quand la moyenne est 10 la probabilité d'avoir au moins 8 SEP est 77,98%. En procédant de même avec l'échantillon de 100000 dont 50000 vaccinés j'ai choisi la valeur 26 pour seuil de décision d'acceptation du sur-risque car la probabilité d'avoir au moins 26 quand la moyenne est 16,67 est 2,05% pratiquement identique à celle d'avoir au moins 8 dans le cas précédent. La probabilité d'avoir au moins 26 quand la moyenne est 50 est 99,90%.

Autrement dit, dans les conditions indiquées, c'est à dire une chance sur 1000 et un risque 3 fois plus grand de faire une SEP quand on est vacciné, on est pratiquement certain de mettre en  évidence le sur-risque avec l'échantillon de 100000 alors qu'il  y a 22% de chances pour ne pas le mettre en évidence avec l'échantillon de 400000.

Sur la puissance statistique voici quelques liens :

 

http://www.tqmp.org/doc/vol3-2/p35-42.pdf

 

http://www.minerva-ebm.be/articles/fr/woordenlijst_fr/Puissance.htm

 

 


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Commentaires
C
Bonjour,<br /> <br /> Et merci pour cet excellent article!<br /> Ce que je constate surtout c'est que les médecins du forum européen de vaccinovigilance y écrivent dans leur rapport également que ce délai des 60 jours est assez fréquent.<br /> Selon eux 3/4 des effets graves (non limités à la seule SEP) surviennent en déans les 2 mois post vaccination -peu importe après quelle dose puisque la roulette russe s'enclenche à chaque dose vaccinale-<br /> De plus comme le Dr Marc Girard (l'expert indépendant pas le sombre idiot de professeur à la solde de l'OMS qui lui est en dessous de tout)le rappelait à l'émission C'est dans l'air il y a quelques mois, en 1991 le Quotidien du médecin parlait de 22 000 cas de SEP en France et le même journal parlait de 60 000 cas en 2002.<br /> Il expliquait aussi comme dans plusieurs de ses analyses que les ventes d'interféron ont bien augmenté pendant et après cette folle campagne des années 90. un interféron utilisé surtout pour le traitement des SEP!!<br /> Il y a vraiment des éléments qui ne doivent tromper personne!!<br /> Bien cordialement.
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