Vaccin Hépatite B et SEP : peut-on y voir plus clair ?
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Vaccin Engerix B : le quart de la commission de pharmacovigilance ne soutient pas ses conclusions
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La
mise en examen de 2 laboratoires à propos de la vaccination hépatite B a
évidemment relancé les polémiques. Ainsi « C dans l’air », l’émission
d’Yves Calvi sur la Cinq, a repris le thème et l’Académie de Médecine a publié
un communiqué de presse. La polémique sur les études statistiques relatives au
risque et à la fréquence d’apparition de SEP a cause du vaccin a été inévitablement relancée, tout
particulièrement celle de Hernan publiée en 2004 et qui avançait un risque 3
fois plus grand. Est-il possible d’y voir enfin plus clair ?
Sur la Cinq, le vendredi 8 février 2008, s’opposaient Robert Cohen
pédiatre infectiologue, correspondant du Conseil national de pédiatrie,
animateur d’InfoVac face au Docteur Marc Girard expert qui se définit lui-même sur son site comme "consultant indépendant et compte,
parmi ses clients, de nombreux industriels dont GlaxoSmithKline et
plusieurs firmes du groupe Aventis-Sanofi" . Il a mis en ligne un site très
documenté sur le sujet.
J’avais découvert Robert Cohen avec l’affaire du BCG SSI où il avait
lancé les pédiatres dans la grève du BCG, contribuant à contraindre ainsi le
ministère à nommer une commission chargée de mettre en place un plan
tuberculose, préalable présenté comme indispensable à la suppression du BCG
obligatoire et généralisé. Au cours des 2 journées de l’audition BCG il avait
fait preuve d’une grande combativité en faveur de cette suppression comme on
peut le constater sur le diaporama
de son exposé. Mais sur l’affaire de la vaccination hépatite B il adopte
une attitude bien différente qui pourrait se résumer par " le
vaccin hépatite B est d’une parfaite innocuité " :
« Moi, je n’ai aucun doute !»
Il va en effet soutenir avec insistance qu’il existe des preuves
scientifiques de l’absence de risque avec ce vaccin, s’exclamant « moi je
n’ai aucun doute », affirmation qu’il limitera cependant, vu sa spécialité
de pédiatre, aux enfants. De tels propos peuvent être efficaces en cabinet pour
persuader une mère de famille de faire vacciner son enfant mais dans un débat
c’est une autre affaire. Il affirmera que sur les 12 enquêtes statistiques sur
le sujet, 11 ont conclu à l’absence de risque et que la douzième, celle de
Hernan, serait la plus petite. Pourtant, le 30 novembre 2007 j’avais pu
entendre de vive voix un expert de l’Afssaps, Mme A. Castot, dire qu’aucune de
ces études ne permettait d’écarter un risque peu fréquent d’accidents graves.
Ce fut aussi la conclusion de la réunion
de consensus de novembre 2004 présidée par le professeur Marc Brodin. Tous
adoptent la célèbre formule : en l’état actuel des études aucune preuve de
cause à effet ne peut être établie, évitant ainsi de trop se compromettre pour
l’avenir et sachant qu’en pratique cela se traduira par « tous les cas
observés sont des coïncidences ». C’est bien ainsi qu’en appel un tribunal
avait annulé la condamnation du tribunal de Versailles au bénéfice du laboratoire
pour le motif d’absence de preuve.
Robert Cohen va se référer à des statistiques donnant les mêmes
proportions de SEP chez les vaccinés et les non vaccinés pour en déduire que le
risque serait le même. Ce point de vue a été repris 4 jours plus tard par le
communiqué de l’Académie de médecine :
« 8 études nationales et internationales ont
démontré l’absence de relation statistiquement significative entre la SEP et la
vaccination contre l’hépatite B. Une étude réalisée par Hernan et publiée en 2004 (résumé par
l’Afssaps ; résumé
par l’OMS) a soulevé des questions mais sa méthodologie a été réfutée
par les experts de l’OMS. Deux réunions de consensus nationales en 2003 et
2004 ont confirmé les recommandations de vaccination prioritaire des
nourrissons et de rattrapage des enfants et adolescents non vaccinés. Tout
récemment ont été publiées deux études des services de neuro-pédiatrie français
(KIDSEP) chez l’enfant et l’adolescent (2007) : la première démontre
l’absence d’influence du vaccin de l’hépatite B sur le risque de passage à la
SEP après le premier épisode de maladie démyélinisante ; la deuxième montre
qu’il n’ y a pas d’augmentation du risque de première poussée de SEP après une
vaccination contre l’hépatite B dans les 3 années précédentes. L’ensemble de
ces résultats a conduit le Haut conseil de santé publique à rappeler les
recommandations de la vaccination le 14 décembre 2007. »
Observons que le principal rédacteur de ce
communiqué, Pierre Bégué, ancien président du Comité technique des
vaccinations, participe avec Robert Cohen à l’animation d’InfoVac dont
l’objectif est de conseiller les médecins pour les problèmes rencontrés dans
leur pratique vaccinale.
Pourtant, ces statistiques veulent seulement dire qu’avec les tailles
d’échantillons retenues il n’a pas été possible de mettre en évidence une
différence significative et non pas que cette différence n’existerait
pas : si le risque est de 1/100 000, soit 250 cas pour 25 millions de
vaccinations, un échantillon de 200 000 personnes en donnera 2 en moyenne, ce
qui en pratique, avec les variations aléatoires possibles, peut en donner 1 ou
3, voire 0 ou 4. Ajoutées aux cas "normaux" non liés à la vaccination
qui peuvent eux aussi connaître des variations aléatoires, les différences
observées n’ont aucune chance d’être significatives. Disons qu’on ne s’est pas
donné les moyens de mettre en évidence un risque de ce niveau là.
Si
on lance un dé et une pièce chacun 3 fois on peut fort bien obtenir une fois l’as et une fois pile. Peut-on pour
autant en déduire que la probabilité d’obtenir l’as et celle d’obtenir pile
seraient les mêmes pour un dé et une pièce ?
Robert Cohen soutiendra que l’étude de Hernan est la plus petite étude
des 12 enquêtes statistiques au motif que seulement 11 cas de SEP sont survenus
chez des vaccinés. Marc Girard soutiendra au contraire que c’est la plus grande
car elle disposait du plus grand échantillon. Comment départager nos 2
protagonistes alors que les 2 affirmations sont exactes, encore que l’on
devrait remplacer "survenus" par "retenus dans l’étude" ?
Tout cela donne une belle opportunité de reprendre la polémique qui a
entouré la publication de la statistique de Hernan en 2004.
L’étude
américaine de Hernan sur la vaccination hépatite B
L’étude statistique qui avait relancé la polémique sur le vaccin hépatite B en 2004 fut réalisée à partir de dossiers médicaux de plus de 3 millions de britanniques parmi lesquels 713 cas de SEP avaient été identifiés. Ces données furent traitées à Boston par Hernan qui était assis sur une forte réputation en statistiques médicales. Il élimina 550 cas tout particulièrement pour le motif que ces personnes n’avaient pas été enregistrées au moyen d’un logiciel bien défini au moins 3 ans avant l’apparition des symptômes. Cette sévère restriction peut se comprendre afin d’éviter des polémiques sur le moment de l’apparition des dits symptômes. Il fut donc retenu seulement 163 cas de sclérose en plaque sur 713 dont 11 avaient été vaccinés moins de 3 ans avant l’identification de la maladie.
A ces 163 cas il fut décidé d’adjoindre 1604 témoins obtenus par tirage au sort parmi les personnes non malades et retenues pour l’étude. Parmi eux il y avait 39 personnes vaccinées et donc 1565 non vaccinées, soit 2,43% de vaccinés parmi les témoins, proportion sans doute voisine de celle de l’ensemble des données, l’échantillon ayant été obtenu de façon aléatoire et étant d’une taille suffisante. La partie la plus longue et fastidieuse d’un tel travail réside dans la collecte des données et l’indispensable tri qu’il faut effectuer.
Avec ces données Hernan estima que le risque de faire une SEP dans les 3 années qui suivaient la vaccination était 3,1 fois plus grand qu’en l’absence de vaccination. Il a probablement voulu trop en faire. L’objectif principal était d’abord de savoir si le risque était plus grand et non pas de le mesurer. Cela était possible de façon qualitative sans avoir à s’engager sur des valeurs quantifiées du risque.
L’un des objectifs de la méthode statistique est de
rechercher une estimation d’une valeur comme par exemple le pourcentage de oui à un référendum ou de
personnes du groupe sanguin B dans une population. Pour limiter le coût de
l’étude on cherche à le faire avec un échantillon aussi faible que
possible. La fiabilité de la méthode
dépend à la fois de la représentativité de l’échantillon et de sa taille.
Mais, lorsque cette estimation ne peut être réalisée
dans de bonnes conditions faute d’échantillons suffisants, il existe un autre
test dit du Khi-2 qui peut permettre de traiter une partie de la question. Sans
entrer dans les détails techniques, on procède ainsi : avec les données
numériques disponibles, c’est à dire ici 11, 152, 39 et 1565 (SEP avec et sans
vaccin ; témoins vaccinés ou non vaccinés), on calcule une valeur qui est
ici 10,03.
|
Cas avec SEP |
Témoins sans SEP |
Vaccinés Hépatite B |
11 |
39 |
Non Vaccinés |
152 |
1565 |
Cette valeur mesure la dispersion des données par
rapport à ce que l’on nomme « l’hypothèse nulle », c’est à dire
l’hypothèse que le risque d’apparition
de la maladie serait le même pour les deux groupes vaccinés et non vaccinés. De
ce point de vue la perfection est donnée par la valeur 0 exprimant un risque
identique au niveau même des échantillons observés. Mais en raison des
variations aléatoires, la dispersion observée ne sera jamais nulle en pratique.
Tout le problème est alors d’apprécier si cette valeur 10,03 mesurant cette
dispersion pourrait s’expliquer par des variations aléatoires ou si elle est
trop importante pour s’expliquer raisonnablement ainsi. Auquel cas il convient
de chercher une cause non aléatoire.
Le principe est simple : si la valeur du
khi-deux (ici 10,03) est faible, rien n’autorise à penser qu’il y aurait une
cause autre qu’aléatoire, même si elle pourrait malgré tout exister ; si la valeur est élevée, il paraîtra
alors peu probable d’expliquer cette valeur uniquement par les inévitables
variations liés à l’échantillonnage. Pour décider ici si 10,03 est grand ou
petit, on démontre que cette valeur, qui dépend de l’échantillon trouvé, suit
une loi de probabilité connue, dite loi du Khi-deux (à 1 degré de liberté dans
notre situation).
On peut alors calculer que sous « l’hypothèse
nulle » il y aura 1% de chance pour que les valeurs observées dépassent
6,63 et moins de 0,2% de chances pour qu’elles dépassent 10. Ici, on est donc
fondé à conclure, de façon très significative (ce qui ne signifie pas
certitude), qu’une cause non aléatoire est vraisemblablement intervenue pour
donner plus de malades dans le groupe désigné par « vaccinés » que
dans l’autre. Restant qualitative, la conclusion est donc moins précise mais la
méthode permet de travailler avec des échantillons plus faibles (et qui sont
ici suffisants) que pour des estimations quantitatives.
Cette conclusion ne signifie cependant pas pour
autant de façon certaine que ce serait la vaccination qui serait la
cause de cette différence : un même groupe pourrait en effet être désigné de plusieurs façons
comme en Irlande du Nord où protestants et catholiques sont aussi socialement
favorisés pour les premiers et défavorisés pour les seconds. Le terme choisi
pour dénommer un groupe ne peut pas être considérée ipso facto comme étant la
cause agissante : s’il y a plus de tuberculose chez les catholiques que
chez les protestants ce n’est pas forcément parce qu’ils sont catholiques mais
plutôt parce qu’ils sont socialement défavorisés.
Si Hernan avait traité les données statistiques
comme je viens de le faire il aurait proposé une conclusion moins précise mais
qui aurait été moins exposée à la critique.
Les critiques sur
l’étude de Hernan
Elles ont été formulées par les experts de l’OMS et par nos experts de l’Afssaps.
Une valeur 11 trop faible
Cette valeur 11 du nombre de SEP vaccinés fut jugée trop faible par la critique. Elle l’est en effet, j’en suis d’accord, mais surtout pour une appréciation quantifiée évidemment plus exigeante que le test qualitatif précédent. Il y avait au moins 3 raisons à cette faible valeur :
1- L’élimination
de 550 dossiers non enregistrés à temps. Une estimation à la proportionnelle en ajoutant ces
550 dossiers donnerait alors 48 cas de SEP apparues chez des vaccinés mais la
valeur réelle pourrait être plus faible ou plus élevée, 35 ou 60 par exemple,
ce qui pourrait influencer fortement les conclusions. Cela a été reproché à
Hernan par les experts de l’OMS et de l’Afssaps.
2- La
restriction à 3 ans pour déclarer un cas comme ayant été vacciné. Ce choix est
arbitraire car il n’existe aucune raison de limiter dans le temps l’apparition
de la SEP en rapport possible avec la vaccination. Mais pour d’autres études ce délai était seulement
d’un an. Qu’à t-on fait dans toutes ces études des vaccinés chez lesquels la
SEP est apparue après le délai fixé ? Espérons qu’ils n’ont pas été transformés
en non vaccinés ! Ce serait parfaitement illicite, ils doivent être exclus
des études et pas seulement de celle de Hernan. Dans le cas contraire cela
reviendrait à déplacer des poids d’un plateau d’une balance vers l’autre,
transformant un déséquilibre prononcé en une situation d’équilibre. J’aimerais
beaucoup pouvoir vérifier si ce principe a bien été respecté.
3- Un
taux faible de vaccinés, 2,43%, dans l’échantillon retenu, ce qui réduit
d’autant la possibilité d’avoir des SEP chez des vaccinés. Cette proportion de
vaccinés paraît bien faible comparée à celle de la France avec 22 millions de
vaccinés en 1998. C’est d’abord lié au fait que la Grande Bretagne a beaucoup
moins vacciné que la France, seulement 5%, ce qui pourrait aussi expliquer pourquoi
ce qui fut observé en France et déclencha la polémique que l’on sait n’a pas eu
d’équivalent en Grande Bretagne. C’est l’accident d’autocar comparé à un
accident de voitures.
Un échantillon non représentatif
A lui seul ce taux de 2,43% montre que l’échantillon
n’est pas représentatif de la population britannique où le taux de vaccinés
était de 5%. Cet
argument et d’autres seront avancés par la critique pour parler d’un biais de
recrutement et affaiblir ainsi la valeur du travail de Hernan. Cette critique
n’est pas vraiment recevable si on retient que l’objectif premier était de
mettre en évidence ou d’infirmer la possibilité d’apparition de SEP liées à la
vaccination hépatite B et non pas
d’évaluer l’importance du risque sur l’ensemble de la population britannique ni
de contester cette statistique parce que l’échantillon ne correspondrait pas à
la situation française comme le fait l’Afssaps :
« La
vaccination contre l’hépatite B ne concerne pas les mêmes patients au
Royaume-Uni et en France. Au Royaume-Uni, seuls les patients appartenant à des
groupes à risque sont concernés par la vaccination (professions de santé ou
situations à risques) entraînant de possibles biais, notamment liés à la
capacité pour les vaccinés d’attirer plus précocement l’attention des médecins
sur des symptômes neurologiques »
Que ce soient les mêmes patients
ou pas dans les 2 pays, peu importe. S’il est possible de mettre en évidence
sur un groupe de population, même particulier, que le vaccin peut déclencher
des SEP, la possibilité en est alors établie, au moins statistiquement. Il
n’est pas acceptable d’écarter cette possibilité pour le motif évoqué. Par
contre on peut toujours soutenir que le risque n’est pas le même pour tous les
groupes mais c’est une autre histoire qui a noyé la première. Notre commission
nationale conclura
ainsi :
« Conclusion des débats de la
Commission Nationale
Après en avoir délibéré, la
Commission Nationale de Pharmacovigilance a adopté à la majorité les éléments
de conclusion suivants :
Cette étude menée au Royaume-Uni
et, récemment publiée, apporte des éléments en faveur de l’existence d’une
association entre la vaccination contre l’hépatite B et la survenue de sclérose
en plaques chez l’adulte.
La prise en compte de l’ensemble
des données disponibles ne permet pas de conclure à l’existence de cette
association. Cependant, un risque faible ne peut pas être exclu chez
l’adulte.
Ces conclusions doivent être
considérées au regard du bénéfice attendu de la vaccination contre l’hépatite
B. »
Des vaccinés classés
non vaccinés dans les autres études ?
Je
reviens sur ce problème important. Des études
autres que celle d’Hernan ne retenaient comme SEP avec vaccinations que
celles qui étaient apparues dans l’année qui suivait la vaccination (voir aussi ce lien pour
plus de détails sur ces études).
Qu’ont-ils fait de ceux chez qui la SEP apparaissait par exemple 15 mois après
la vaccination ? Pour étudier valablement le problème posé ces cas doivent
être exclus de l’étude pour ne comparer que les SEP vaccinés moins d’un an
auparavant avec ceux qui n’avaient reçu aucune vaccination hépatite B. La
conclusion pourra alors être, par exemple, qu’aucune différence significative
n’a pu être mis en évidence, au niveau des échantillons disponibles, entre le
risque de SEP sans vaccin et le risque d’apparition d’une SEP dans l’année qui
suit la vaccination. Ou au contraire qu’une différence significative existe,
selon ce qui aura été observé.
Pour comprendre l’importance du problème imaginons le scénario suivant : dans une population vaccinée à 50% on a observé 500 SEP dont 250 apparues dans l’année qui a suivi la vaccination. Reste donc 250 SEP qui ne satisfont pas à ce critère et qui constitueraient le second groupe. L’équilibre semble parfait et la conclusion paraîtrait être que la balance est équilibrée. Mais s’il y a eu 100 cas de SEP apparues chez des vaccinés au delà de la première année et 150 cas non vaccinés on doit comparer les 250 vaccinés avec SEP dans l’année à ces 150 et non pas aux 250 restants. La conclusion est alors très significatives en faveur d’un risque plus élevé après la vaccination.
Avec cet exemple on comprend comment on peut appliquer le principe classique pour rétablir l’équilibre d’une balance déséquilibrée : faire passer des poids du côté qui penche vers l’autre…Ici on prend les 100 vaccinés avec SEP au delà d’un an pour les mettre sur le plateau non vaccinés. J’ose espérer qu’ils n’ont pas fait cela, ce serait scandaleux, mais j’aimerais pouvoir le vérifier.
L’expert Marc Girard estime, selon les informations dont
il dispose, que le risque de SEP n’est pas un risque faible mais au contraire
élevé, voire très élevé. Or, si ce risque est élevé des études auraient dû le
mettre en évidence : les tailles de leurs échantillons dépassant les 100
000 (par exemple l’étude de Zipp et coll, 1998, a suivi une cohorte de
134 698 sujets) et en admettant un risque élevé de l’ordre de 1 pour 2500
cela ferait en moyenne 40 SEP en plus par tranche de 100 000 ce qui aurait dû
donner des écarts significatifs. Par contre, si on admet un risque de 1 pour
25000 par exemple, cela donne 4 cas supplémentaires en moyenne pour 100 000, ce
qui peut être insuffisant pour déceler une différence significative.
Contrairement à Marc Girard, les experts de l’OMS, de l’Afssaps ou de la
réunion de consensus de novembre 2004 ont toujours admis que si le risque
existait il ne pouvait être que faible. Dans ces conditions, il est
effectivement impossible de soutenir que le risque serait élevé, sauf à
admettre que les données statistiques auraient été faussées et par exemple
traitées comme je le suggérais, c’est à dire en classant comme non vaccinés les
vaccinés ayant fait une SEP au delà du délai arbitraire imposé. Je le répète,
pour l’honneur scientifique des auteurs de ces études ainsi que des
institutions qui s’appuient sur elles pour définir leur politique de santé
publique en la matière, et qui savent sans doute à quoi s’en tenir, j’ose
espérer qu’il n’en est rien. J’espère seulement avoir un jour la possibilité de
constater que mes interrogations n’étaient pas fondées. Cependant, vu ce à quoi
j’ai assisté en matière de manipulations statistiques dans l’affaire du BCG SSI
on peut malheureusement craindre que l’impensable puisse être la réalité. Voir
à ce sujet mes 3 principaux articles : "descendue
du Sinaï, l’expertise était dans la lune ! ", "Cas
évités par le BCG, un calcul très simpliste", "Des défaillances de
l’expertise vaccinale à la nécessité d’une critique citoyenne".
Additif : le mardi 11/03/08 Arte diffusait « Le monde selon
Monsanto » disponible en DVD sur son site. A propos des décès pouvant être
associés à la dioxine j’ai pu entendre un scientifique dire qu’il avait
consulté les 2 études sur le sujet. La première classait un certain nombre de
personnes décédées dans la catégorie "avec dioxine" mais certaines
d’entre elles avaient été reclassées "sans dioxine" dans la seconde
étude réalisée par Monsanto. Ainsi, ajouta-t-il, l’équilibre était rétabli et
Monsanto pouvait annoncer que rien ne prouvait que la dioxine avait tué. Mon
interrogation n’est donc pas totalement infondée : de telles pratiques
sont dans le domaine du possible.
Peut-on vérifier une affirmation en accédant aux données
brutes d’une étude ? Au cours de la même émission, un participant a voulu
avoir accès à de telles données concernant les effets d’un produit de Monsanto.
Il a frappé à de multiples portes sans rien obtenir. Il s’exclame que de telles
données devraient être publiques et disponibles pour tous afin que ceux qui le
souhaitent puissent les étudier.
On retrouve les mêmes ingrédients avec la vaccination hépatite
B : des experts font des enquêtes et annoncent leur conclusion, toujours
la même, et on doit les croire. Qu’un autre expert publie des résultats
contraires et son étude est aussitôt déclarée bourrée d’erreurs et de failles
jetant le discrédit non seulement sur l’étude mais aussi sur la compétence de l’auteur.
L’effet diluant des critères statistiques
La décision de limiter à une durée d’un an la prise en compte d’une SEP apparue chez un vacciné n’a aucune justification puisqu’on est dans l’ignorance du mécanisme biologique par lequel le vaccin pourrait déclencher une telle maladie. Rien ne permet de dire qu’en se manifestant 15 mois ou 40 mois après la vaccination celle-ci ne saurait être en cause. Voici un exemple amusant permettant de comprendre à quoi on pourrait arriver ainsi :
Supposons que l’on veuille étudier par une statistique l’éventualité d’un lien de cause à effet entre les rapports sexuels et les naissances. On décide de classer comme étant « nés avec rapport sexuel » les enfants nés moins de 3 mois après le dernier rapport et comme « nés sans rapport sexuel » ceux nés plus de 3 mois après. Il ne serait pas impensable de pouvoir produire une statistique conduisant à conclure que la preuve d’une relation ne saurait être établie. S’emparant de cette conclusion statistique pourtant prudente et non définitive, les autorités pourraient alors proclamer que le phénomène des familles nombreuses étant sans lien avec l’activité sexuelle, il n’y a plus aucune raison pour se restreindre !
De plus, les études statistiques ne prennent pas en compte la durée
entre la vaccination et les premiers symptômes car ils sont généralement
seulement enregistrés par le patient et non par un médecin, donc considérés
comme non fiables. Aussi un trouble apparu quelques jours après la vaccination,
comme assez souvent dans les témoignages, se transforme en SEP apparue dans
l'année, ce qui pourrait tout changer. Au moins pour cette raison les statistiques
de SEP ne sont pas satisfaisantes car beaucoup de témoignages font état de
troubles soudainement apparus dans les jours ou semaines qui suivaient la
vaccination. Mais les études n’ont pas cherché à prendre en compte cette
simultanéité qui frappe tous ceux qui prennent connaissance de ces témoignages.
C’est une forme de dilution dans le temps. De plus, Marc Girard fait remarquer
que les critères de définition statistique de la maladie ont été durcis, ce qui
conduit à allonger la durée nécessaire pour reconnaître la maladie et donc
franchir la limite d’une année.
43% des cas
dans les 2 mois après la vaccination, est-ce vraisemblable !
Plutôt que de chercher à allonger la durée prise en compte on pourrait
au contraire la restreindre à 2 mois pour tenter de prendre en compte la durée
très courte souvent relatée entre la vaccination et les premiers symptômes.
Dans cette optique je suis interpellé par cette affirmation du bilan de la commission
nationale de septembre 2004 :
« Le
bilan des cas notifiés au réseau national des centres régionaux de
pharmacovigilance, aux laboratoires et à l’association de patients REVAHB
(Réseau Vaccin Hépatite B) recense :
- un
total de 1110 cas d’affections démyélinisantes centrales, dont 898 cas de
sclérose en plaques (SEP), signalés depuis la mise sur le marché des vaccins
contre l’hépatite B jusqu’au 31 décembre 2002. Respectivement 43,5%,
79,2% et 94,4% d’entre eux sont survenus dans les 2 mois, 12 mois et 3
ans suivant la vaccination.
- L’examen des caractéristiques de ces
observations de SEP en termes d’âge, sexe, forme clinique, facteurs de risque,
délai d’apparition et type d’atteinte neurologique ne permet aucunement de les
différencier des SEP classiques, ni d’affirmer la responsabilité du vaccin dans
leur survenue. »
Car enfin, 43,5% de ces 1110 cas
recensés à l’époque dans les 2 mois qui suivent la vaccination paraît a priori
un argument très fort. Mais a-t-il vraiment été correctement incorporé dans
les études statistiques ? Supposons d’abord que l’on cherche à
confirmer ou infirmer l’affirmation que la St Valentin serait un facteur
déclenchant d’affections démyélinisantes : on pourrait chercher à
comptabiliser ces affections apparues entre le 14 février et le 15 avril. On
peut penser, si la saison n’intervient pas dans l’affaire, ce qui est
vraisemblable, qu’on trouverait à peu près le sixième des cas totaux dans
l’année (ou sur plusieurs années cumulées). Le sixième soit 16,7% et non pas
43,5%. L’objection qui sera alors faite serait sans doute que la date de la
vaccination n’est pas la même pour tout le monde et c’est ce qui permet une
dilution sur toute l’année. Mais supposons que tous aient été vacciné le 14
février et que l’on ait non pas à peu près 16,7% de cas jusqu’au 15 avril mais
43,5%, soit 26,8% d’excédents par rapport à la moyenne attendue, on aurait là
un élément très fort en faveur de l’action du vaccin sur ces 26,8% de cas. Par
contre, si les dates de vaccinations sont réparties uniformément sur l’ensemble
de l’année, les 26,8% vont se diluer sur chacune des 6 périodes de 2 mois que
l’on considérera.
Par exemple l’étude de Touze (1997, revue neurology 2000) retient 121 cas apparus dans les 2 mois, soit 20
cas en moyenne par tranche de 2 mois. Ces valeurs peuvent être trop faibles
pour faire apparaître des différences significatives.
Evaluer la probabilité de coïncidence
Supposons que l’apparition d’une affection démyélinisante soit
indépendante de la vaccination, ce qui est l’hypothèse que l’on cherche à
tester. Supposons que pour une personne donnée le destin ait fixé cette
événement malheureux pour le 2 juillet 1997. Supposons maintenant que la
décision de sa vaccination ait été prise pour l’année 1997 et que la date soit
choisie au hasard dans l’année. On a alors une chance sur 6 pour que cette
personne soit vaccinée dans les 2 mois qui précèdent l’apparition de la maladie
et 5 sur 6 du contraire. Sous ces hypothèses on devrait avoir 5 cas sur 6, soit
83,33% des cas, en dehors de cette fourchette de 2 mois alors qu’on en a
56,5%. Si le nombre total de cas
enregistré en 1997 est suffisant, nul doute que la différence sera très
significative (60 cas dans l’année seraient suffisants).
La troisième hypothèse peu ne pas paraître totalement réaliste mais
elle permet de faire simple pour pouvoir calculer la probabilité de coïncidence
sous ces conditions. Il faudrait d’ailleurs corriger en multipliant par la
probabilité que la décision de vaccination soit justement prise l’année où la personne
va déclarer sa maladie, ce qui réduirait encore cette probabilité. De toute
façon un créneau de 2 mois c’est très court ici et la probabilité que la
personne soit vaccinée justement dans les 2 mois qui précèdent une maladie de
cette nature, maladie qui n’apparaît qu’une seule fois dans une vie et
rarement, est certainement très faible. Admettre, comme je l’ai fait, que cette
probabilité serait de 1/6 apparaît plutôt comme une large surestimation qu’une
sous-estimation. Cela ne veut pas dire que la coïncidence soit impossible mais
je doute a priori qu’elle puisse se produire pour 483 cas sur 1110. Il y a là
en effet quelque chose qui me chiffonne. Supposons qu’on annonce avoir trouvé
1110 personnes vaccinés hépatite B puis victimes d’une fracture du fémur dont 483 dans les 2 mois après cette
vaccination. Cela paraîtrait immédiatement complètement invraisemblable à tous.
On pourrait concevoir là un moyen de comparaison : choisir un événement
médical rare et sans lien apparent avec la vaccination hépatite B et comptabiliser combien s’en produisent
dans les 2 mois qui suivent la vaccination.
Peut-on traiter la question d’une façon plus rigoureuse ? L’étude
statistique consiste à associer des témoins aux cas recensés. On suppose ces témoins soumis aux mêmes aléas
que les cas. Par comparaison entre les témoins et les cas on évite d’avoir à
décrire la nature de ces aléas et on se dispense d’avoir à évaluer des
probabilités de coïncidences impossibles à gérer en toute rigueur. Faute de
données plus précises sur ces témoins il nous est impossible, à nous les
témoins de ce spectacle imposé par les acteurs de la santé publique nationale
et mondiale, de reprendre ces études pour le cas échéant mettre en évidence des
couacs dans leurs prestations. En investiguant comme je le fais je n’essaie pas
de convaincre mais de faire réaliser l’invraisemblance de la conclusion par
rapport aux chiffres fournis : sur une période de 2 mois et un nombre important de victimes (1110) il n’est pas
vraisemblable que l’on puisse avoir 483 coïncidences avec des maladies
démyélinisantes dont des SEP. Ce pourrait être différent pour la grippe par
exemple qui est saisonnière et répétitive, ainsi que sa vaccination.
Si les études concluent à la coïncidence, ou du moins à l’impossibilité
de mettre en évidence le contraire, c’est de manière quasi certaine qu’elles
contiennent une erreur importante.