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La Question des Vaccins
30 janvier 2008

Le vaccin contre le pneumocoque favorise-t-il les souches non vaccinales ?

La question est posée par une étude publiée le 18 janvier 2008 par l’InVS. Si on manque encore de recul pour conclure définitivement, les données obligent à s’interroger. En effet, l’augmentation importante de la couverture vaccinale chez les enfants de moins de 2 ans en 2006 a été parallèlement accompagnée d’une augmentation des infections et méningites à pneumocoque de souches non contenues dans le vaccin. Coïncidence ? Le phénomène a été observé aux Etats Unis et pourrait inquiéter.

 

La vaccination

C’est en janvier 2003 que le vaccin anti-pneumococcique heptavalent PCV7 a été introduit dans notre calendrier vaccinal pour les enfants de moins de 2 ans jugés à risque. Cette recommandation vaccinale a été élargie en juin 2006 à tous les enfants de moins de deux ans. Le vaccin PCV7 couvre les 7 sérotypes 4, 6B, 9V, 14, 18C, 19F et 23F qui étaient les plus fréquemment retrouvés chez l’enfant avant l’introduction de la vaccination.

 

2005 : diminution du nombre de cas

En 2005 on a observé une diminution de l’incidence des méningites et des infections à pneumocoque chez l’enfant de moins de 2 ans alors que cette diminution n’était observé ni chez les enfants plus âgés ni chez les adultes. Selon l’InVS ces observations paraissaient très en faveur d’un impact positif de la vaccination par le PCV7.

 

2006 : légère augmentation

Chez l’enfant de moins de 2 ans, l’incidence des méningites à pneumocoque est passé de 5,4 cas/100 000 en 2005 à 6,0 cas / 100 000. De même, l’incidence des infections bactériémiques à pneumocoque qui était de 17,1 pour 100 000 en 2005 est passé à 17,5 cas / 100 000 en 2006. L’InVS note pour le moins une stagnation du nombre de cas alors que la couverture vaccinale par le PCV7 a augmenté : les remboursements de PCV7 ont progressé de 20 % chez les enfants de moins d’un an entre 2005 et 2006 et la proportion des enfants qui ont reçu une primo vaccination complète estimée à 44 % au 1er trimestre 2006 était estimée à 56 % au 1er trimestre 2007 lors de deux enquêtes réalisées sur un échantillon d’enfants de 6 à 12 mois.

Recrudescence des souches non vaccinales

L’InVS note que

« l’incidence des méningites à pneumocoque de sérotype vaccinal a diminué de 2,3 à 1,1 cas / 100 000 entre 2005 et 2006 (- 54 %), tandis que celle des méningites à pneumocoque de sérotype non vaccinal a augmenté de 3,1 à 4,9 cas / 100 000 entre 2005 et 2006 (+ 56 %) chez les enfants de moins de deux ans. De même, l’incidence des infections bactériémiques à pneumocoque de sérotype vaccinal a diminué de 7,8 à 5,3 cas / 100 000 (- 32 %) entre 2005 et 2006 tandis que celle des infections bactériémiques à pneumocoque de sérotype non vaccinal a augmenté de 9,4 à 12,2 cas / 100 000 (+ 31%) entre 2005 et 2006 chez les enfants de moins de deux ans. »

« Parmi les sérotypes non vaccinaux retrouvés dans les méningites et les infections bactériémiques chez les enfants de moins de 2 ans, deux sont prépondérants en 2006 : les sérotypes 7F et 19A. L’incidence des infections invasives liées à ces 2 sérotypes a augmenté depuis 2004-2005. Alors qu’ils représentaient moins d’une souche sur 8 (12 %) en 2001-2002, ils représentent en 2006 près de 4 souches sur 10 (37 %). »

« Par contre, chez les enfants plus âgés et les adultes, aucune tendance évolutive importante de l’épidémiologie des infections invasives à pneumocoque n’apparaît depuis 2001, qu’il s’agisse de sérotypes vaccinaux ou non vaccinaux. »

L’expérience américaine

Le vaccin PCV7, le Prevenar, est produit par le laboratoire américain Wyeth dont c’est le seul produit phare. Il a ainsi été introduit aux USA avant la France et ce pays a déjà pu faire quelques observations. L’InVS rapporte que

 « le remplacement des sérotypes vaccinaux par des sérotypes non vaccinaux a été observé aux Etats-Unis où l’incidence des cas dus à des sérotypes non vaccinaux a augmenté de 22% chez les enfants de moins de 5 ans quatre ans après l’introduction du PCV7 tandis que l’incidence des cas dus à des sérotypes vaccinaux a diminué de 97 %. Aux Etats-Unis le sérotype 19A a émergé comme le sérotype le plus fréquent représentant 35 % des souches isolées chez les enfants de moins de 5 ans en 2004. »

Malgré cette expérience concordante l’étude se veut prudente avant de conclure ainsi et considère comme

« prématuré de conclure aujourd’hui à une émergence de sérotype non vaccinaux qui serait liée à la pression de sélection exercée par la vaccination des nourrissons. La poursuite de la surveillance en 2007 permettra de mieux apprécier et interpréter cette augmentation des cas dus à des souches de sérotypes non vaccinaux. »

Bilan provisoire positif

L’étude veut continuer à se montrer favorable à la poursuite de la vaccinations et aux bénéfices attendus chez les adultes grâce à la réduction de la circulation des souches chez les enfants :

« En France l’incidence des méningites et des infections bactériémiques chez le jeune enfant reste inférieure en 2006 à celle qui était observée pendant la période pré vaccinale (-28%). Si les données de surveillance française les plus récentes suggèrent que le bénéfice de la vaccination parait être réduit par l’émergence de sérotypes non vaccinaux, le solde reste en faveur de la vaccination. De plus, un impact indirect de la vaccination par le vaccin PCV7 sur l’incidence des infections invasives chez les sujets âgés est attendu avec une amélioration de la couverture vaccinale et du respect du schéma vaccinal complet recommandé en France (3 doses à 2,3 et 4 mois de vie et un rappel entre 12 et 15 mois). Cet effet lié à une diminution du portage des souches vaccinales chez les enfants a été observé aux Etats-Unis mais n’est pas encore perceptible en France, où l’introduction du PCV7 est plus récente. »

Tout cela confirme que le lancement d’une campagne de vaccination reste une aventure et une expérimentation menée sur les populations qui n’ont nullement conscience des problèmes épidémiologiques posés par ces campagnes et des inconnues majeures qui les entourent. Il y a loin du vaccin de laboratoire aux effets collectifs d’une campagne de vaccination.

Attendons la suite…

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Commentaires
B
D'abord merci pour l'appréciation que vous portez sur mon blog, c'est un encouragement précieux. <br /> <br /> Je dois aussi dire que je ne suis pas médecin mais ancien mathématicien. D'ailleurs je ne pense pas que ma démarche soit celle d'un médecin : j'essaie d'analyser les avis des comités d'experts et cela me demande beaucoup de temps qu'un médecin en activité n'aurait pas et je n'aborde pas les aspects médicaux mais plutôt épidémiologiques.<br /> <br /> Pour ce qui est du Prevenar je n'ai pas vu d'éléments répondant directement à votre question. Disons que la pandémie a bon dos pour justifier un vaccin protecteur des complications de la grippe chez des sujets difficiles à vacciner contre elle...<br /> <br /> Pour les sujets âgés le problème avait été étudié par le CTV en 2002 (Rosenheim). La conclusion était pour le moins mitigée : <br /> <br /> "CONCLUSION<br /> <br /> Près de 30 ans après la mise sur le marché du VPP, la polémique sur son intérêt chez le sujet âgé n'est toujours pas éteinte. Il n'est probablement pas nécessaire de faire une revue extensive de la littérature pour en conclure que cette efficacité, si elle existe, est probablement faible, de même que son intérêt en santé publique.<br /> <br /> Son efficacité chez le sujet jeune immunocompétent n'est par contre pas discutable mais là encore, en dehors de certaines situations particulières, telles que populations particulièrement susceptibles au pneumocoque, l'intérêt en santé publique de vacciner des sujets à faible risque n'est pas évident.<br /> <br /> L'intérêt chez les sujets à risque de moins de 65 ans ne semble pas entièrement démontré. D'une part, certaines méta-analyses regroupent les sujets âgés et les sujets à risque et ne démontrent pas d'effet dans ce groupe, d'autre part, il n'y a pas de preuve définitive de l'efficacité du vaccin dans certaines pathologies.<br /> <br /> L'équipe de JC Butler, pourtant partisan convaincu de ce vaccin, écrit dans une récente revue de la littérature18, que l'efficacité du vaccin n'est pas démontrée dans certaines indications : (voir le tableau dans le document )<br /> <br /> Il deviendra peut-être nécessaire de réévaluer les recommandations du CTV et du CSHPF du VPP, vaccin paradoxal car efficace chez ceux en ayant le moins besoin."<br /> <br /> http://www.hcsp.fr/hcspi/docspdf/cshpf/r_mt_021212_rapport.pdf<br /> <br /> Bernard Guennebaud
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C
Cher confrere,<br /> merci pour votre site question vaccin que je consulte regulierement en particulier pour le Prevenar. Ce n'est pas un vaccin que j'affectionne particulierement du fait que nous n'avons pas encore beaucoup de recul et que l'emergence des souches non inclues dans le vaccin est tres preoccupante. A la television (aux informations) il a été dit que le Prevenar etait fortement recommandé chez les nourrissons pour eviter les complications grippales.... Beaucoup de mes patients m'interroge à ce sujet. Qu'en pensez vous ?<br /> Merci pour votre reponse. Confraternellement. Docteur Caudie COHEN Pédiatre à l' Hay les roses 94240
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